En des temps où certains veulent tout conflictualiser,
où l’adversaire est traité en ennemi ou pire encore,
je veux partager avec vous l’ubuntu,
l’idéal d’humanité que portait Desmond Tutu, Prix Nobel de la Paix en 1984 :
« Je suis ce que je suis à cause de ce que nous sommes tous. »
Pour aller plus loin
Desmond Tutu qui a dirigé la Commission Vérité et réconciliation, après la chute de l’apartheid en Afrique du Sud, expliquait plus précisément ce que veut dire ce mot Ubuntu. Il vient de la langue Xhosa, mais il renvoie à un concept présent dans les langues bantoues de l’Afrique australe. « Ce mot exprime le fait de se montrer humain . Lorsque nous voulons faire connaître tout le bien que nous pensons de quelqu’ un, nous disons : « Yu, u nobuntu », « Untel a de l’ ubuntu »; ce qui signifie qu’ il est tout à la fois généreux, accueillant, amical, humain, compatissant et prêt à partager ce qu’ il possède. C’ est aussi une façon de dire : » Mon humanité est liée inextricablement à la vôtre » ou » Nous appartenons au même faisceau de vies ».
Aux funérailles de Nelson Mandela, le président Obama a rappelé comment la vie de Madiba a été charpentée par l’ubuntu : « Il a reconnu le fait que nous sommes tous liés les uns aux autres d’une façon que l’œil ne peut pas voir ; il y a une unité pour l’humanité ; c’est en partageant avec les autres et en nous occupant de ceux qui nous entourent que nous nous réalisons ».
Couverture du livre Ubuntu, je suis car tu es.
En 2019, la petite fille de Desmond Tutu, Mungi Ngomane, a publié un ouvrage intitulé Ubuntu, je suis car tu es. Elle montre que ce mot exprime la croyance en un lien humain universel, un lien profond et sincère, qui pousse à respecter chaque individu comme part essentielle de notre propre humanité.
L’ubuntu est donc une manière d’être humain, une façon de se conduire en humain, une pratique de l’humanité mutuelle. En somme c’est tout le contraire de l’idéologie libérale, telle qu’elle s’exprime de façon cristalline dans la formule de Margaret Thatcher : « There is no such thing as society », « il n’y a pas de société, il n’y a que des individus, hommes et femmes ». Selon le dogme libéral, il n’y a rien à attendre de la solidarité collective, ni de la collectivité et même pire, l’Etat providence n’aurait comme effet que d’enfermer les individus dans l’assistanat et de les rendre incapables de toute initiative. Et tant pis pour ceux qui tombent au bord de la route, ils seront écrasés par la marche indifférente des vainqueurs d’un jour eux-mêmes écrasés demain par d’autres qui se voudront plus forts, plus efficaces, mieux armés pour la concurrence dans la jungle libérale.
Mme Thatcher n’est plus de ce monde, mais ses idées ont prospéré dans les sphères politiques, dans les médias (certains se sont même spécialisés), et dans les échanges quotidiens au marché, au bistrot. Avec des expressions paroxystiques, chez Trump et ses amis, le spécimen le plus remarquable étant Elon Musk.
Alors, choisissons l’humanité
Face à cette idéologie triomphante, redisons avec force que c’est dans l’entraide, la tension vers la solidarité et l’effort collectif que l’individu se réalise et a les meilleures chances, d’être heureux et fier de lui-même. Ce message n’a rien d’original, on le trouve dans les grandes religions (quand leurs adeptes n’oublient pas les principes de base), chez tous les humanistes et dans (presque) toutes les sortes de gauche. Ce mot qui nous vient du plus défavorisé des continents devrait être le mot clé pour que 2025 soit une année de bonheur partagé.
Le mot de la fin pour Nelson Mandela
« Respect, serviabilité, partage, communauté, générosité, confiance désintéressement. Un mot peut avoir tant de significations. C’est tout cela l’esprit d’ubuntu « !
En bonus, la chanson de Johnny Clegg, le zoulou blanc, Asimbonanga (lien vers la traduction)