Ce matin, partout en France, les anciens combattants, les élus, les enfants des écoles, des citoyens en nombre sont réunis pour rappeler la mémoire de nos morts, des soldats, des combattants volontaires, de ceux qui ont versé leur sang pour la patrie. Avant la sonnerie aux morts et la minute de silence, on égrènera les noms gravés sur les monuments, des noms parfois mal prononcés, parce que désormais inconnus : Jarsalé devient Jarsal’, Pillet (comme gillette) rime avec millet.
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11 novembre, moment de mémoire
Nous ne serons pas ensemble ce matin au pied du monument aux morts de notre commune pour marquer le souvenir de la Grande Guerre. En notre nom à tous, le maire déposera une gerbe en l’honneur de tous les combattants tombés au champ d’honneur. Mais chacun de nous peut, doit même, prendre un moment pour se remémorer le sacrifice de nos soldats.
Dans son recueil Le Roman inachevé, le poète Louis Aragon évoque l’effacement du souvenir des poilus (La Guerre et ce qui s’en suivit)
Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit Déjà vous n'êtes plus qu'un mot d'or sur nos places Déjà le souvenir de vos amours s'efface Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri
Léo Ferré a mis en musique plusieurs strophes de ce poème
Ce 11 novembre 2020, Maurice Genevoix, l’auteur de Ceux de 14, entre au Panthéon. Témoin de la Grande Guerre, il a combattu jusqu’à ce jour de 1915 où il est touché de trois balles; grièvement blessé, il est réformé, et à la demande d’un de ses amis de l’Ecole Normale Supérieure, il commence à retranscrire ses souvenirs qui seront rassemblés dans le livre.
Avec lui, célébrons ce 11 novembre, date consacrée comme fête nationale depuis 1922, une sorte de culte républicain, une cérémonie civique destinée, non pas à valoriser la guerre, mais à manifester l’hommage de la Patrie aux citoyens, comme nous le faisons aujourd’hui.
Je dis bien la patrie, car la notion de patrie peut nous rassembler dans la fraternité, alors que l’idée de nationalisme porte le germe du refus de l’autre, du refus de l’étranger, le venin de la haine. Et je voudrais citer quelques mots du grand ethnologue Claude Lévi-Strauss prononcés sous la coupole de l’Académie Française, le 13 mai 2005 : « J’ai connu, disait-il, une époque où l’identité nationale était le seul principe concevable des relations entre les Etats. On sait quels désastres en résultèrent. Il n’est aucun, peut-être, des grands drames contemporains, qui ne trouve son origine directe ou indirecte dans la difficulté croissante de vivre ensemble. L’humanité, poursuivait-il, est devenue sa propre victime. »
Écoutons bien la leçon de Lévi-Strauss, ne nous laissons pas abuser par les chants funèbres des nationalistes comme Maurras, Déroulède ou Barrès qu’on a surnommé le rossignol des carnages; ou bien, fredonnons Gottingen la chanson plus légère, mais plus humaine, de Barbara:
Et tant pis pour ceux qui s'étonnent Et que les autres me pardonnent Mais les enfants ce sont les mêmes, A Paris ou à Göttingen O faites que jamais ne revienne Le temps du sang et de la haine Car il y a des gens que j'aime, A Göttingen, à Göttingen
Par Le Grand Condé — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=29115923