Respect aux anciens combattants


Jeudi 8 mai, nous allons commémorer la capitulation de l’Allemagne nazie, nous célébrons la fin de la guerre en Europe, oubliant que le Japon n’a capitulé que le 2 septembre 1945. La municipalité a souhaité, pour cette année, donner plus d’éclat à la cérémonie. Pour ma part, je ne pourrai y assister, retenu par une autre obligation, mais je veux ici mettre l’accent sur les anciens combattants et la relation que nous, un peu ou beaucoup plus jeunes, pouvons avoir avec eux.

Au mieux l’indifférence
Bien des gens, surtout les jeunes, portent sur les anciens combattants et leurs associations un regard d’indifférence : vraiment d’une autre époque ! Notre temps, forcément moderne, se moque bien des médailles, des fanions et des drapeaux. Comme chantait Brassens ; « la musique qui marche au pas, cela ne [les] regarde pas ». Plus les années passent, plus les anciens combattants se font rares. On l’a bien vu à la cérémonie du 19 mars, les rangs de la FNACA, dont les membres sont pourtant les plus assidus, et surtout pour cette date, étaient bien clairsemés. Quant au public, il était peu nombreux. Il est vrai que c’était un jour de travail.
Parfois, l’indifférence se change en dérision, et même en invectives. Dans les années 80, invité de l’émission culte 7 sur 7, Daniel Balavoine, vedette de la chanson – on dirait aujourd’hui célébrité – avait lancé un coup de gueule : « je voudrais dire devant tout le monde que j’emmerde les anciens combattants, qu’on a autre chose à foutre que s’occuper des anciennes guerres (…) et que le jour des commémorations on ferait mieux de manifester pour les guerres qu’il y a actuellement ! » Indignation facile, populaire ; mais comme souvent, avant de s’indigner, il faut peut-être prendre le temps de réfléchir.

Ceux de 14
Ils ont survécu à la grande boucherie de 14-18, pour beaucoup, mutilés, estropiés, gueules cassées, et tous délabrés dans leur tête, heureux d’en avoir échappé, ou parfois honteux d’y avoir survécu, quand leurs camarades étaient tombés sous les obus ou dans des combats sauvages. Ils se retrouvaient chaque année devant les monuments où étaient gravés les noms des morts. Plus de 300 sur la colonne du cimetière de Questembert. Le poème d’Aragon Tu n’en reviendras pas en donne un écho sublime.

Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit
Déjà vous n'êtes plus qu'un nom d'or sur nos places
Déjà le souvenir de vos amours s'efface
Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri.

Des millions de prisonniers
Non, la Grande Guerre n’a pas été la der des der. Le3 septembre 1939, malgré les accords signés à Munich, c’est la déclaration de guerre suite à l’invasion de la Pologne (de l’Ukraine) et les troupes françaises sont massées sur la ligne Maginot d’où, selon les stratèges, nos vaillants soldats s’élanceraient pour aller pendre notre linge sur la ligne Siegfried. Après la drôle de guerre, la Wehrmacht déclenche l’offensive et l’armée française est balayée en un mois. Près de 2 millions de soldats (1 845 000) sont faits prisonniers et envoyés en Allemagne dans des camps de travail. Quelques uns (environ 10%) pourront rentrer dans le cadre de la prétendue relève. D’autres réusssirent à s’évader, mais la plupart ne purent rentrer qu’après la capitulation de l’Allemagne nazie. Après la guerre, ils rejoignent massivement l’association des Anciens Combattants Prisonniers de Guerre et les sections locales organisent le sapin de Noël pour les enfants des ACPG et des excursions collectives. Et bien sûr le banquet du 11 novembre.

Archives départementales du Morbihan

Des appelés pour une guerre sans nom
Si les soldats mobilisés en 39 croyaient encore un peu à leur mission de défendre la patrie, rien ou presque ne pouvait motiver les conscrits du milieu des années 50 pour aller faire la guerre en Afrique du Nord, malgré le discours officiel qui les présentait comme des forces de l’ordre face aux rebelles, aux fellagha. Il leur a fallu attendre quarante ans pour que la réalité de cette guerre soit reconnue et que le 19 mars soit reconnu comme date officielle de commémoration. La plupart des anciens combattants de cette guerre sont rassemblés dans la FNACA et ils sont très présents aux cérémonies du 19 mars, bien sûr, mais aussi au 11 novembre et au 8 mai.

Ni rire, ni blâmer, mais comprendre
J’ai déjà eu l’occasion de rappeler pour les plus jeunes l’intérêt, la nécessité d’écouter la parole des grands parents. Je crois que, tous, nous devrions prendre le temps de prêter attention à ce que nos aînés peuvent nous dire ; d’autant que beaucoup d’entre eux ont gardé enfouie au fond d’eux-mêmes la trace de blessures secrètes. La prochaine cérémonie du 8 mai devrait être un moment privilégié de rencontre pour comprendre un peu leur vécu.

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