Chaque année, le conseil municipal est amené à examiner le « compte administratif », en fait, le compte de résultat de l’exercice écoulé. Pour le vote, il y a rarement des surprises : le vote est souvent unanime. La presse en rend compte brièvement en donnant des chiffres qui ne sont pas forcément faciles à interpréter, et de toute façon, c’est trop succinct. D’où cet article qui mêlera les explications sur la situation communale et les informations plus générales.
Les budgets de nos collectivités : organisés en 2 sections.
Le compte administratif examiné en conseil est en ligne ici sur le site officiel de la commune.
Les instructions ministérielles définissent un cadre global pour la présentation des budgets des communes et des communautés de communes. La première règle est qu’ils doivent équilibrer les dépenses et recettes ! Il arrive que des candidats aux élections municipales promettent un budget équilibré ! J’avais marqué mon étonnement dans un article du 13 mars 2020 Informer, communiquer, une obligation pour les élus
La deuxième règle concerne l’organisation en 2 sections, la section d’investissement, (pages 8-13) qui rassemble les dépenses et recettes concernant des biens durables : bâtiments, voirie, réseaux, etc. et la section de fonctionnement (pages 2-7) qui regroupe les dépenses courantes (salaires des personnels et les « frais généraux ») et les recettes apportées par les impôts, les dotations de l’Etat, et la participation des usagers au service public (le restaurant scolaire par exemple).
Une vidéo ancienne, mais toujours utile
A quelques semaine des élections de 2014, le Monde avait mis en ligne une vidéo explicative sur le budget des communes. Elle est toujours utile.
Diffusion en vidéo
En raison de la crise sanitaire, le public ne peut pas assister aux sessions du conseil municipal, mais on peut voir ou revoir la séance du 15 février en vidéo
- sur la page FB Ville de Questembert, c’est ici
- sur les infos du pays gallo, c’est là vers la 49ème minute
Eh non, il n’y a pas d’argent en mairie !
Ce fut une découverte, absolument inattendue, pour un nouvel élu, il y a de cela quelques années. En effet, la mairie n’a pas d’argent liquide, ni de compte-chèques. C’est le « percepteur », le comptable du « Trésor public » qui encaisse les recettes, qui paie les factures… et qui en plus garde dans ses caisses l’argent de la commune. Le maire, lui, selon les décisions votées par le conseil, émet les factures – les titres de recette – et ordonne les dépenses. Donc inutile de cambrioler une mairie, il n’y a rien dans les caisses.
Des informations accessibles, mais pas toujours faciles à comprendre
Les informations budgétaires sont légalement accessibles à tous les citoyens. D’ailleurs, les délibérations du conseil du 15 février sont publiées sur le site de la commune, avec les annexes, dont le compte administratif. Les conseillers, mais aussi tous les citoyens, sont en droit de demander le détail des lignes budgétaires. Les conseillers ont ainsi demandé au maire d’expliquer pourquoi le compte 6262, frais de télécommunications, est passé de moins de 20 000 en 2019 à presque 50 000 euros en 2020. Stricte application de l’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 Art. 15. La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. Donc, pas la peine de croire « on nous cache tout, on nous dit rien. » Tout est sur la table ! Mais ce n’est pas toujours facile à comprendre.
Regardons d’abord le tableau qui récapitule la section de fonctionnement, la vue d’ensemble, page 2 du document présenté au conseil municipal.
La première ligne sur fond vert donne les intitulés des colonnes des dépenses de fonctionnement : CA 2017, CA 2018, BP+DM 2019, CA 2019, BP+DM 2020, CA 2020. Les CA, comptes administratifs, et pour les deux dernières années, une colonne BP+DM, le Budget primitif voté en mars, et les « décisions modificatives », qui viennent ajuster les prévisions initiales, comme en 2020, où il a fallu modifier le budget primitif en raison des effets en dépenses et recettes de la crise sanitaire.
Ainsi, les élus – et les citoyens – peuvent repérer des évolutions à surveiller d’une année sur l’autre, et bien sûr, pour les deux derniers exercices vérifier s’il y a ou non un écart entre la prévision (BP+DM) et le résultat final ( CA).
Dépenses de fonctionnement : les lignes sur fond bleu
Dans la première partie du tableau, les lignes sur fond bleu regroupent les chapitres de dépenses. Le chapitre 011 rassemble les « frais généraux » déclinés en 4 lignes, qui elles-mêmes sont détaillées dans les pages suivantes (1,451M€ ); le chapitre 12 donne le total des dépenses de personnel, en 3 lignes détaillées ensuite (3,282 M€) ; l’autre gros chiffre est celui du chapitre 65 « Autres charges de gestion courante » (1,048 M€) dont on trouve le détail ensuite, mais notons déjà les lignes subventions au CCAS, lourdement affecté par la crise sanitaire (416 K€) et aux associations (345 K€), dont la subvention à l’école Notre-Dame dans le cadre du contrat d’association. La dernière ligne importante est le chapitre 66 153 K€ pour les intérêts des emprunts, sachant que le remboursement du capital se fait dans la section d’investissement.
Recettes de fonctionnement
On retrouve une autre ligne sur fond vert pour le tableau des recettes de fonctionnement : CA 2017, CA 2018, BP+DM 2019, CA 2019, BP+DM 2020, CA 2020. Les plus grosses recettes viennent des impôts locaux (ch 73 :5,498 M€ en 2020) et des dotations de l’État et autres (ch 74 : 2,168 M€). La ligne 70 (505 K€) correspond entre autres aux recettes du restaurant scolaire (273 K€). Ces données globales sont détaillées dans les pages suivantes.
Les recettes et dépenses d’ordre
A côté de ces dépenses et recettes réelles, on trouve ce qu’on appelle les recettes et dépenses d’ordres. Pour dire les choses simplement, ce sont des jeux d’écriture. En recettes, on trouve essentiellement les « travaux en régie », c’est-à-dire la valorisation du travail des personnels communaux dans les investissements. Dans les dépenses, on trouve la dotation aux amortissements : il faut provisionner le remplacement des biens en fonction de leur durée de vie.
Deux lignes particulières
En dépenses de fonctionnement, la ligne 023 qui n’apparaît que dans les colonnes BP+DM : Virement à la section d’investissement avec la somme de 1,625 M€ au BP 2020. On retrouve cette même somme dans la section d’investissement à la page 9 du document Compte Administratif (ligne 021).
L’autre ligne à remarquer apparaît au bas de la page 2 et seulement dans les colonnes CA : Solde de fonctionnement 2,024 M€. Cette somme représente l’excédent constaté à la fin de l’exercice 2020, alors que la ligne 023 définissait un objectif à atteindre dans la gestion courante.
Un excédent qui assure les moyens pour l’investissement
C’est un excédent important – un peu plus de 31 % – assez nettement supérieur à celui que dégagent les communes de la même strate (de 5 000 à 10 000 habitants) : 14 % en moyenne. Ces informations comparatives sont accessibles sur le site Collectivités locales, en suivant le lien Comptes individuels des collectivités.
Il ne s’agit pas de se glorifier des « bénéfices », mais de s’assurer, par une gestion très maîtrisée, les moyens des investissements de la commune. Ne vous méprenez pas sur ce commentaire : je ne veux pas souligner le bon travail de la nouvelle municipalité, d’ailleurs vous me feriez remarquer que ce n’est qu’une demi-année ou presque. Non, c’est une gestion dans la continuité, comme la gestion de la municipalité antérieure continuait celle d’avant 2014 (mais, ils ne s’en sont rendu compte que tardivement!).
A partir de la page 8, la section d’investissement
L ‘excédent dégagé en fonctionnement vient alimenter les recettes d’investissement après le vote en session budgétaire. Dans le tableau ci-dessous, on voit comment a été traité l’excédent 2019 pour le budget 2020. On retrouve ces chiffres à la page 9 du CA : à la première ligne 001 en bleu, le solde reporté (439 K€), puis un peu au-dessous, la ligne 1068, Excédent de fonctionnement capitalisé : 2,167 M€.
Les principales recettes d’investissement (page 9)
Outre ces deux chiffres, on retrouve en prévision, au BP, le virement à la section d’investissement 1,635 M€, mais la ligne 021 est vide dans la colonne CA.
Plus haut sur la page, le chapitre 10 regroupe, en plus de la ligne 1068, le FCTVA (Fonds de Compensation de la TVA : la commune paie la TVA, mais elle est – partiellement – remboursée de cette dépense), le produit de la Taxe d’aménagement sur les permis de construire.
Le chapitre 16 retrace les emprunts, quand il y en a. Au chapitre 40 est inscrite la dotation aux amortissements qu’on avait vue en dépense de fonctionnement.
Les principales dépenses d’investissement
Dans la vue d’ensemble, on trouve le remboursement du capital des emprunts : 867 K€, et des lignes Immobilisations incorporelles, immobilisations corporelles, immobilisations en cours, qui sont plus détaillées dans les pages suivantes. Noter aussi les travaux en régie (127 K€, qui ont été vus en recettes de fonctionnement) : la section d’investissement paie au fonctionnement les heures de travail du personnel communal qui ont produit des biens durables ; par exemple, les techniciens du bureau d’études ont préparé des investissements en voirie (plans, dossiers d’appel d’offres).
A partir de la page 10, sont présentées les opérations avec, à gauche, les dépenses et, à droite, les recettes. Pour chaque opération, on trouve une colonne report (de l’année précédente), une colonne nouveaux crédits, puis le total BP+DM, avant la colonne CA (les réalisations) et les sommes reportées. Du côté des recettes, on ne trouve guère que les subventions affectées aux opérations, sachant que l’essentiel des recettes viennent de l’opération non-affectée en page 10.
Les deux plus grosses opérations sont l’école (op 102 : 926 K€) et la voirie (op 110 :873 K€). L’observation la plus importante, dans ce CA 2020, est l’écart entre la prévision à 6,828 M€) et la réalisation (3,354 M€ : c’est souvent le cas, mais la crise sanitaire est venue creuser cette différence.
A chacun d’approfondir
J’ai tenté dans cet article de rendre accessibles des informations nécessaires pour comprendre un peu l’action municipale. Chaque citoyen peut approfondir en confrontant cette présentation synthétique au document vu par les conseillers municipaux. Je dirais même que c’est nécessaire pour tout citoyen qui se veut actif.
A suivre…
- Les orientations budgétaires, une interview de Maxime Picard, adjoint aux finances
- Le plan pluriannuel d’investissement, en commençant par 2021, un entretien avec Boris Lemaire.