Nous avons vu comment se fabrique une liste municipale, et intercommunale. Mais n’est-il pas intéressant de se demander qui est la tête de liste, comment ce choix a été arrêté. Et comment concilier la priorité affichée de faire participer les citoyens et la décision très personnelle de se présenter en chef de file ?
Des qualités attendues
Le plus simple, c’est de renvoyer au portrait du maire idéal que donnait F. Goulard dans Ouest-France du 11 janvier : « La priorité est d’avoir la personnalité adéquate pour porter un projet. Quelqu’un qui soit un animateur, un meneur qui sache conduire dans la durée. »
Pour notre commune, il faut aussi quelqu’un qui puisse porter la voix de Questembert à la communauté de communes, au pays de Vannes. Car ce sera un des enjeux du prochain mandat.
Vous regarderez sûrement avec attention la composition des listes, vous vous demanderez qui est à la hauteur des responsabilités à assumer. Demandez-vous aussi pourquoi la tête de liste est à cette place. Voici quelques réflexions qui peuvent vous être utiles.
Je veux bien être votre tête de liste !
L’histoire remonte à 1989, c’est lointain, mais significatif. Après une belle carrière militaire puis de responsable administratif, Bernard Thomyre, un « vieux » Questembertois revient au pays. Il veut mettre son expérience et son dynamisme (indiscutables) au service de Questembert. Noble ambition. Il monte une belle opération de communication pour la ville, le symposium de la plasturgie. Pour les municipales, il offre ses services à ceux dont il est sans doute le plus proche… mais il revendique la tête de liste. Ce sera non ! Je suis à l’époque responsable de la section PS de Questembert (c’est l’époque du congrès de Rennes, si vous voyez ce que je veux dire) Il m’invite dans sa résidence : « Je veux bien partir avec la liste de gauche, mais je serai tête de liste. » Il a fini par monter une liste… et par gagner l’élection de 1989. Son bilan est mitigé, mais reconnaissons qu’il a fait prendre conscience à tout le monde que la situation financière de la commune à l’époque était catastrophique et qu’il a en partie redressé cette situation. Spécialiste du logement social, il a réalisé la résidence Louis Thomas pour les personnes âgées autonomes, et, suite à la création du lycée d’enseignement général, il a construit la salle de Sports n°2 (Salle Roger Caret)
Je veux être élu !
Si l’on comprend l’ambition de Bernard Thomyre, et si on comprend facilement que les groupes locaux structurés ne pouvaient si facilement lui céder le leadership, il y a d’autres cas où l’ambition est vraiment au-delà des capacités. Je laisserai les lecteurs trouver des exemples concrets. Mais j’en ai plusieurs en tête. Tel candidat, se prenant peut-être pour le messie, veut purger la ville à la fois des petits bourgeois endormis et des « socialo-communistes ». Il parle bien, a suivi un cursus universitaire (sans doute un peu gonflé) et réussi à rassembler une liste complète… dont, par charité, je ne dirai rien. (dites à monsieur l’abbé que je pratique quelquefois cette vertu).
N’étant pas dans le secret des consciences, ne disposant pas non plus d’un cabinet noir pour espionner ce qui se passe dans les cénacles qui préparent les municipales, je ne saurai pas dire comment les plus actifs de l’opposition d’avant 2014 ont pu se retrouver sur la touche, ni comment l’union sacrée des conservateurs et des bien-pensants n’a pu se réaliser cette année. Je vous laisse sur ce point à vos réflexions et à vos interrogations.
La décision de l’appareil du parti, ou du parrain local
Il peut arriver aussi que les appareils partisans ou le parrain local (à l’échelle du département par exemple) imposent leur choix ! Sans remonter à de trop vieilles histoires, Jean de Kerangat avait toutes les cartes en main pour devenir conseiller général du canton de Questembert en 1973, mais M. Marcelin en a jugé autrement et son éminence grise Caroff a fait ce qu’il fallait pour faire élire Jo Briend.
Evidemment, les partis qui se trouvent en phase de conquête essaient de repérer les meilleurs candidats pour faire avancer leurs pions… C’était vrai hier – je peux en témoigner – c’est encore vrai aujourd’hui. Là bien sûr, je parle de partis structurés et pas de mouvance intellectuelle, comme peuvent l’être au niveau local l’écologie ou l’éventail social-démocrate.
Leadership dans le groupe
Dans les groupes engagés dans la vie locale, apparaissent « naturellement » des leaders qui, au départ en tout cas, ne manifestent pas d’ambition particulière… Et puis, le groupe se dit : « ce serait bien que nos idées soient présentes dans la gestion municipale ». Les questions arrivent : qui peut ; qui veut ? Et voilà une candidature qui émerge, et qui peut-être va rencontrer les attentes des électeurs.
Le Loup devenu berger
Tout ce que je vous ai dit jusqu’ici concerne des gens plutôt sincères, avec leurs ambitions, leurs capacités (ou non!), leur insertion dans la vie locale… Mais il y a une dernière catégorie qui me met très mal à l’aise : ceux qui avancent masqués, sans dire qui ils sont vraiment, quelles idées les guident dans leur projet.
Amateur des fables de La Fontaine, je vous invite à lire et à méditer Le Loup devenu Berger. C’est éclairant.