Sur les réseaux sociaux, comme à la terrasse des bistrots, ou encore dans les réunions de famille (ah oui, bientôt Noël), nos traditions FRANÇAISES sont au cœur des discussions ou des querelles. On y met notre drapeau, nos valeurs, notre foi, nos coutumes, nos crèches. Il y a aussi l’apéro saucisson/vin rouge… et tout récemment le foie gras vient de s’y ajouter.
Des traditions pas si traditionnelles que ça
Le foie gras de Noël est une tradition récente, sauf en Périgord et quelques autres lieux. Une tradition qui n’est pas à la portée de tous, non plus. Quant à l’apéro, il s’est généralisé assez récemment, même si le Dubonnet remonte au XIXème siècle… comme médecine antipaludéenne.
Andouille de Guémené, cassoulet de Toulouse, carbonnade flamande ou cervelle de canut lyonnaise, sont évidemment des plats traditionnels régionaux, mais désormais supplantés par le big-mac, le couscous ou la pizza.
Nos crèches
Personne n’aurait trouvé à redire aux crèches sans l’idée saugrenue de certains maires d’en installer une dans leur mairie, lieu symbolique de notre laïcité républicaine, qui accepte toutes les religions sans en privilégier aucune. Les mêmes élus ou presque qui dénoncent les signes ostentatoires de pratique religieuse dans le voile des femmes.
A vrai dire, les crèches ne me gênent en aucune façon et j’ai plaisir à conduire mes petits enfants à Pleucadeuc pour faire le tour des crèches installées un peu partout dans la commune. Voilà bien une tradition religieuse – les premières crèches apparaissent au XIIIème sous l’impulsion des Frères Prêcheurs de St François d’Assise – qui a perdu une bonne part de sa signification. Pour n’être plus qu’un des décors de la grande fête de la consommation qu’est devenue la fête de Noël. Avec les illuminations… multiplication à l’infini de l’étoile des rois mages, avec le sapin qui est sans doute une christianisation (luthérienne) d’un rite païen lié au solstice d’hiver.
Notre foi, nos valeurs ?
Notre foi ? Si l’on se fie à l’analyse publiée par l’IFOP en août 2021 (à lire ici), 51 % des Français affirment croire en Dieu ; ils étaient 56 % en 2011. Et moins de 7 % se disent catholiques pratiquants. Ce qui fait bien peu de monde pour parler de notre foi ! Et je suis bien sûr que la plupart de ceux qui affichent cela sur leur mur facebook sont aussi peu croyants que les autres.
S’agit-il de nos valeurs ? Où il faut entendre, je crois, qu’il s’agit de valeurs chrétiennes. En effet, les partis chrétiens, en Europe comme en Amérique, se réclament de certaines valeurs traditionnelles comme la condamnation de l’homosexualité ou de l’avortement ou la promotion de la famille, du travail ou de l’identité nationale. En fait, ce sont simplement des programmes conservateurs présents partout dans le monde, en Chine communiste comme en Turquie musulmane. Juste un programme qui n’a rien de spécialement chrétien. Et d’ailleurs le même texte religieux peut en effet justifier des pratiques radicalement différentes. Témoignage chrétien et Civitas se réclament de l’Evangile ; en Israël, les partis orthodoxes brandissent la Bible que partagent aussi les militants de la Paix maintenant. Et on retrouve ces lectures duales chez les Musulmans… même si l’Islam libéral est aujourd’hui moins visible. Notez que sur les 5,5 millions de français de confession musulmane en France, une moitié seulement sont pratiquants. Et pratiquants ou pas, ils se reconnaissent comme… Français ! Mais permettez-moi de penser que les valeurs françaises ne sont pas dans le porc ou le vin rouge…
Le faux nez de la haine de l’autre
Oui, sous couvert de valeurs, se cache souvent l’ethnocentrisme, c’est-à-dire « nous sommes les seuls civilisés, les seuls vrais humains ». Rien de nouveau là-dedans, pour les Grecs, ceux qui n’étaient pas Grecs étaient les … Barbares : le mot désigne ceux qui ne parlent pas une langue humaine, ceux qui baragouinent, un mot qui devrait éveiller un écho chez les bretonnants. Derrière le prétendu soutien à nos traditions, à nos valeurs, c’est le refus de la différence, de la singularité de l’autre. Et là on n’est bien loin du message de fraternité et de paix qui, paraît-il, est au cœur du message de Noël.
Belle analyse Paul, bien souvent ceux qui prônent la tradition sont ceux qui la défendent le moins.
Un peu à la marge, mais avec aussi des points de convergence, c’est sans doute un peu ce que disait de façon un peu différente Michel SERRES dans son ouvrage « C’était mieux avant ! » (https://www.editions-lepommier.fr/cetait-mieux-avant). Notre cerveau a un côté traître quand il nous fait retenir ce qui nous va bien en nous éloignant de la vérité. Merci Paul pour ta contribution.
Des santons à la c***, pourquoi pas des playmobil?
Voilà que le professeur Didier Raoult, flop 2021 du monde médical, selon le Quotidien du médecin (https://www.lequotidiendumedecin.fr/actus-medicales/le-pr-didier-raoult-flop-2021-du-monde-medical) est le santon de l’année!
Une belle illustration de ce dévoiement des traditions que vous évoquez.
Bah non, pas d’accord Opticon, le ravi de la crèche est une vieille tradition de santons.