Amener la culture ?

Lundi soir 23, le journal de FR3 – oh pardon ICI – présentait une séquence sur un superbe projet de la commune de Le Saint, au Nord-Ouest du Morbihan. En effet, la commune a racheté aux Haras d’Hennebont un chapiteau géant (avec les gradins et le chauffage) pour 60 000€. Avec l’ambition d’en faire un lieu culturel, pour les spectacles équestres, mais pas seulement, pour du théâtre, du cabaret.

La séquence de FR3

Un article de France3-regions.franceinfo.fr Une soucoupe volante au milieu des champs

Amener la culture en milieu rural?
Très intéressant, sauf que le journaliste explique (vers 1’50) : « Objectif : rendre la commune plus attractive et amener la culture en milieu rural. » Une commune plus attractive ? Pourquoi pas ? Trop souvent, les habitants, surtout les jeunes, s’imaginent qu’ailleurs on est mieux, que l’herbe est plus verte… Et donc, rendre à tous un peu de fierté peut être une belle ambition. Mais pourquoi prétendre « amener la culture en milieu rural » ? Comme, dans les années 50, on avait amené l’électricité ou l’eau courante ? Ou plus tard, le téléphone ou maintenant la fibre optique ? En effet, il n’y avait pas l’électricité, ni l’eau courante, ni non plus le téléphone ou internet. Nous serions, dans les campagnes, privés de culture ?

La richesse de nos territoires
Membre de la Communauté de Roi Morvan, Le Saint n’est pas un désert culturel et la Communauté a signé avec la DRAC et la Région Bretagne un pacte de développement culturel qui définit de grands objectifs et les moyens humains et financiers pour les atteindre. Questembert Communauté n’a pas, pour le moment, engagé une telle démarche. Cependant, dès 2021, les élus ont lancé un projet intercommunal pour la culture, qui s’est concrétisé d’abord par un diagnostic et un inventaire des pratiques et des offres. La synthèse de l’enquête a montré le foisonnement des initiatives culturelles de notre territoire. Et justement, pour ceux que leurs œillères enferment dans leur sillon laborieux, cette diversité permet de multiples ouvertures. On peut aimer le heavy metal et les duos trompette et orgue des concerts du marché, la danse bretonne et la country, la peinture sur porcelaine et les galipettes provocatrices des artistes de rue. Et sortir de la répétition, de la reproduction, ou parfois de la copie frelatée.

Se rassembler et s’ouvrir aux autres
Les pratiques artistiques nous font du bien, elles nous rassemblent dans des plaisirs partagés, mais les propositions nouvelles nous ouvrent à des expériences inattendues et nous permettent de nous ouvrir à l’autre, aux autres. Tout le contraire du repli sur soi, du renfermement sur un passé souvent fantasmé.

Des goûts et des couleurs ?
Il ne faudrait pas débattre des goûts et des couleurs ? Si, bien sûr, sans oublier que, refuser, mépriser le goût des autres revient souvent à montrer son… dégoût des autres ! Alors allons-y hardiment, osons confronter nos points de vue artistiques et accepter des apports extérieurs. Juste un clin d’oeil : La Gacilly a donné à son centre culturel le nom d’Artemisia ; je suis sûr que cela a dû piquer la curiosité et en inviter plus d’un à se renseigner sur cette Artemisia, femme peintre du XVIème siècle (une femme artiste, libre, créatrice!) dont les œuvres sont montrées dans une belle exposition à Paris.

Ploucs, toujours ?
Amener la culture au monde rural. La phrase du journaliste m’a écorché les oreilles. Non pas que je sois un adepte du ruralisme, cette tendance à idéaliser la vie à la campagne, et surtout la vie d’autrefois, comme dans le temps ! (la terre ne ment pas, comme disait l’autre). Non, mais je ne veux pas non plus que les clichés des urbains nous ramènent à nos sabots crottés. Il y avait comme ça une chansonnette entendue jusque dans les années 50.

Dis-moi donc, sacré con d’paisan
Dans tes souliers, mets-tu des chaussettes ?
Dis-moi donc, sacré con d’paisan
Dans tes sabots, mets-tu des bas biancs ?

    Du mépris brutal, dont je pourrais donner de multiples exemples. Les choses ont changé, le mépris se fait plus subtil, masqué sous la condescendance, quelquefois même habillé d’oripeaux scientifiques, comme lorsqu’on parle de la France périphérique. Heureusement, un travail collectif récent mené par des sociologues et des associations a donné un éclairage plus vaste aux Paroles de campagne, une vaste enquête présentée dans Ouest-France et sur France Culture.

    L’étude complète est accessible ici Télécharger le pdf.

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