La richesse des communes

Ma contribution sera plus modeste que celle d’Adam Smith sur La Richesse des Nations, mais il m’a semblé intéressant au moment où une nouvelle municipalité vient de prendre en main les affaires de notre commune de partager avec vous quelques réflexions sur les différents aspects de notre patrimoine. Le bulletin/magazine municipal n°13 de janvier-février 2020 y a consacré un dossier : Un héritage bien vivant ; et, de mon côté, j’avais invité mes lecteurs à ne pas confondre l’histoire du patrimoine avec le bureau des légendes.

Patrimoine naturel, patrimoine immatériel

Mais il n’y a pas que les Halles, les chapelles, les fontaines – qui méritent notre attention ; il faut aussi s’intéresser au patrimoine naturel, la biodiversité aussi bien que les paysages au croisement du pur naturel et de l’action humaine (le bocage, par exemple). Et ne pas oublier le patrimoine immatériel : pratiques de la vie quotidienne, parler gallo. Sans mélanger non plus l’amour du patrimoine et le folklore de carnaval.

Une coiffe gallèse
Une coiffe gallèse

Il n’est de richesse que d’hommes

J’ai bien souvent cité cette phrase de Jean Bodin, (1529-1596), un humaniste de la Renaissance. Sans doute faut-il la compléter pour la rendre plus claire :

« Il ne faut jamais craindre qu’il y ait trop de sujets, trop de citoyens : vu qu’il n’y a richesse, ni force que d’hommes : et qui plus est la multitude des citoyens (plus ils sont) empêche toujours les séditions et factions : d’autant qu’il y en a plusieurs qui sont moyens entre les pauvres et les riches, les bons et les méchants, les sages et les fous : et il n’y a rien de plus dangereux que les sujets soient divisés en deux parties sans moyens : ce qui advient ès Républiques ordinairement où il y a peu de citoyens. »

Retenons quand même que la vraie richesse ne réside pas que dans les biens matériels et que la force d’un pays vient de sa population. A ce titre, j’espère que nous aurons bientôt des données tirées du recensement de la population réalisé au début de l’année 2019. Nous n’avons eu aucune information sur le sujet. Faudrait-il en conclure que les résultats sont moins bons qu’espérés ?

Le capital fixe d’Adam Smith ou les « immobilisations corporelles et incorporelles »

S’il y a un recensement qui permet de faire le compte des richesses humaines, il y a aussi un inventaire des biens physiques, des  immobilisations corporelles et incorporelles ». Elles sont retracées dans la comptabilité communale, mais on y voit surtout les mouvements : nouvelles immobilisations, sorties d’inventaire. C’est pourquoi on devrait sans doute y insister plus précisément.

Pour préparer le débat sur les orientations budgétaires, les services de Questembert Communauté dressent chaque année des tableaux du foncier bâti, du patrimoine immobilier non bâti, et des autres immobilisations.

Tableau du patrimoine bâti de QC
Le tableau du patrimoine bâti de QC
QC Autres immobilisations et patrimoine foncieer
QC : les autres immobilisations et le patrimoine foncier



Un simple calcul montre que la valeur du patrimoine de Questembert Communauté est aux alentours de 34 M€. Évidemment, pour la Communauté, l’histoire est toute récente et il est facile de tenir l’inventaire des biens. C’est beaucoup plus compliqué pour la commune ! Et pour certains biens, il va être difficile d’en écrire la valeur : ainsi de l’église ou des chapelles, et même de l’ancienne école publique, rue Jean Grimaud.

Les services du Trésor ont permis un toilettage de l’inventaire, en proposant d’en supprimer des lignes obsolètes ; pourtant il serait intéressant que les conseillers, mais aussi les citoyens puissent avoir accès à ce document. Ce serait d’ailleurs un outil d’évaluation du travail de la municipalité : une sorte de point zéro au début du mandat (l’état de l’existant) et chaque année, l’accroissement – ou la réduction – du patrimoine. Par exemple, dans le mandat 2014-2020, le patrimoine communal s’est accru d’une école neuve (4,7 M€ HT), mais sur le même site, on a perdu un plateau sportif (peut-être sans valeur, mais il faut le noter quand même) ; la commune a agrandi son cimetière (acquisition et travaux pour un total de 200 K€ environ) et dans le même temps elle a rayé d’un trait les dépenses qui avaient été consenties pour le projet du Grand Célac 110 K€. Autre exemple : en 2018, la commune a revendu pour 45 K€ la maison Guillement acquise en 2007 pour 203 K€.

Mais aussi des espaces naturels propriétés communales

A côté des bâtiments ou d’équipements, il ne faut pas oublier des propriétés foncières sans utilisation directe. On ne parlera pas ici des terrains du Galinio dont les usages sont facilement perceptibles (terrains de sports, verger conservatoire), mais on attirera l’attention sur les propriétés communales autour de Célac. Ou bien encore sur les taillis de zones humides du côté de Tréfévan qui pourraient être valorisés en gestion durable pour la fourniture de bois énergie…

Autour de Célac, des propriétés communales
En plus du comping et de l’étang, plusieurs propriétés communales
Des taillis communaux du côté de Tréfévan
Plusieurs hectares de bois du côté de Tréfévan

Ces quelques exemples montrent l’intérêt d’affiner l’inventaire des biens communaux, surtout à un moment clé de l’installation d’une nouvelle municipalité. Quelle plus-value ou moins-value va-t-elle apporter à notre patrimoine commun ?