Sauver l’étang de Célac? (Histoires d’eaux 7)

Voici une 7ème page de mes Histoires d’eaux. Commencée avec l’eau des puits et des fontaines de village, des puits publics en ville, de l’eau des lavoirs, de l’eau des marais et des prés mouillés dans Histoires d’eaux 1, la série m’a conduit à regarder le changement radical des années 50 avec L’eau à la maison, histoires d’eaux 2, premières réponses pour amener l’eau à la maison : pompes à béliers, électropompes, réseaux de village puis la construction des réseaux d’eau potable et de tout-à-l’égout dans la ville dans Le service d’eau (Histoires d’eaux 3). Le 4ème article L’eau désirée, l’eau rejetée (Histoires d’eaux 4) soulignait à la fois la peur de l’eau dont on se débarrasse au plus vite et le désir de l’eau. Le 5ème volet s’attachait aux charmes et plaisirs de l’eau. Le dernier article publié rappelait la mode, aujourd’hui passée des étangs, lacs et plans d’eau.

Sauver l’étang de Célac, vaste ambition, mais de quoi donc faut-il le sauver ? De l’envasement ? Alors, il faut sans doute aller chercher le concours d’Hercule qui détourna un fleuve pour nettoyer les écuries d’Augias. Mais on comprend vite qu’il s’agit de sauver l’étang de la volonté destructrice d’une municipalité aveugle (et accessoirement technocratique, sectaire et ignorante).

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Sentier botanique, une idée à mettre à jour

Avez-vous remarqué le long du sentier autour du vallon de St-Martin ces petites plaques vertes fixées sur des poteaux de bois ? Châtaignier, prunellier, merisier, etc. Parfois, il ne reste que le poteau, ou bien le frêne que signale ici la plaque a disparu. Traces d’un sentier botanique imaginé par Alain Enard, adjoint au maire Bernard Thomyre (1989-1995). Une idée simple (je ne dis pas simpliste) et peu coûteuse qui pourrait être repensée avec les moyens de maintenant.

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Parler Gallo ?

Stéphane Batigne, éditeur, m’a convaincu de publier un livre qui recueille un peu plus de mille mots et expressions du parler gallo de Questembert. Le titre Le Parler gallo du Pays de Questembert est ambitieux pour un glossaire, un lexique où les lacunes, les manques, sont bien plus étendus que les bribes qui me restent de ma langue maternelle.

L’ouvrage, que j’ai eu du plaisir à écrire, et qui en donnera aussi, j’espère, aux lecteurs, paraît dans un moment de fortes tensions autour des langues régionales et de leur enseignement. La question était loin de mon propos ; cependant elle s’impose à moi aujourd’hui : la loi que mon ami Paul Molac (il a signé la préface de mon livre) a réussi à faire adopter était une réelle avancée pour la reconnaissance de la richesse linguistique de notre pays. Et voilà que des juges ont jugé qu’elle mettait en danger l’unité de la République.

Comme chantait Brassens dans Le grand Pan :

La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s’est mise à frapper les cieux d’alignement,
Chasser les dieux du firmament

Au moment où nous sommes engagés dans un grand mouvement de défense de la biodiversité et nous devrions assécher notre diversité culturelle et linguistique ! Absurde. C’était au débat lundi 31 mai sur Arte, avec ensuite, un portrait sympathique de Paul Molac par Thibault Nolte. A regarder ci-dessous:

https://www.arte.tv/fr/videos/104102-002-A/les-langues-regionales-menacent-elles-l-unite-de-la-republique/

Un gallo unifié ?

N’empêche que si l’on veut enseigner une langue, il faut qu’elle soit stabilisée, normée. Manifestement, on parle – on parlait – un gallo à Questembert, on en parlait un autre au pays haut, au pais haot [pe ɔw], dès Pluherlin, Malansac et Pleucadeuc, et un autre un peu plus loin. Des gallos divers, sans doute, si divers que vouloir les unifier, les uniformiser relève de l’utopie. Devrons-nous, dans cette langue normalisée, dire moi, ou mê [mɛ], ou maille [maj] ? Dire beau, boou, baou, ou biaou ? Quelle autorité pourra décréter cette unification ? D’où tiendra-t-elle sa légitimité ? Ne serait-ce pas faire au gallo ce que le français académique a imposé ou tenté d’imposer aux multiples variantes des parlers gallo-romans, du picard au poitevin, de l’occitan au franc-comtois ? Nous avons aussi nos académiciens et je ne vais pas m’immiscer dans leurs querelles.

Car il n’y a pas dans mon modeste ouvrage de quoi répondre aux exigences d’un enseignement : je n’ai pu rassembler que des bribes, je dirais même des lambeaux, du parler gallo de Questembert. Et je ne veux pas à partir de ces fragments faire pour la langue ce que Viollet-Leduc a osé pour les cathédrales gothiques.

Du grain dans l’ gueurnieu, du cit’ dans le ceullieu ?

Il ne faut pas, selon moi, que ce gallo unifié devienne une construction artificielle, composite. Nous avons tous entendu dans les réunions d’anciens ces chansons ou ces contes où le pommier devient le pommieu, le grenier, le gueurnieu. Le gallo, les parlers gallos, c’est bien autre chose : des mots spécifiques, avec chez nous des emprunts au breton vannetais, une grammaire particulière, là encore métissée de structures bretonnes, mais surtout des sons caractéristiques (des phonèmes), une ligne mélodique, une prosodie spéciales. Si tout cela n’est pas rassemblé, restitué, le résultat obtenu n’est qu’un gallo de cuisine, un peu ridicule, comme pouvait l’être l’anglais prononcé par Maurice Chevalier.

Quelques exemples

En immersion ?

Cette restitution achevée est la condition de la réussite de l’enseignement immersif, si on le tentait pour le gallo de Questembert. En effet, la méthode immersive est sans aucun doute la plus efficace pour l’apprentissage d’une langue. J’en ai fait l’expérience personnelle au début des années soixante-dix au centre de linguistique appliquée de Besançon. C’était un stage intensif de russe ; prévu pour 6 semaines, il a été réduit à 4 en raison du congé maternité de la formatrice franco-russe ; mais de 8 h du matin à 18h le soir, déjeuner inclus, 5 jours semaine ; sans support écrit, mais avec diapositives et enregistrements sonores. D’un redoutable efficacité, nous en étions à rêver en russe ! Pour ma part, je n’ai pas eu l’occasion de pratiquer ce que j’avais appris de la langue, mais la méthode m’a servi pour enseigner le français à des anglophones débutants. La condition de la réussite, c’est, je le répète, la parfaite maîtrise par le formateur de toutes les composantes de la langue : lexique, syntaxe, morphologie, phonétique, prosodie. Et pour revenir à notre gallo questembertois, quelle immersion peut-on imaginer quand la source s’est quasiment asséchée ?

Des pistes pour enrichir

Ce glossaire est incomplet, lacunaire, je le reconnais ; je sais déjà comment je peux l’enrichir. J’ai découvert récemment sur la toile un livre ancien Le Breton usuel (dialecte de Vannes) de Loeiz Herrieu.

J’avais déjà repéré des transferts du breton au gallo et vice-versa, mais à feuilleter le livre de Loeiz Herrieu, j’en ai trouvé beaucoup plus : je vais tâcher d’explorer cette piste pour enrichir une prochaine réédition. Je crois que je devrai aussi préciser le sens de certains mots : qu’est-ce qu’une culasse de grain ? Cela représente 80 Kg, 135 Kg ou 150 Kg  de blé ? Cela donne 100 Kg de farine livrés chez le boulanger par le meunier ? Il y aura des mots à supprimer : par exemple, le mot cotia pour la digitale est sans doute un mot du pays haut, le mot du gallo de Questembert étant beurlu [bøʁly] (cf breton vannetais brulu). Et j’invite mes lecteurs à enrichir, à compléter, à corriger aussi, ce que j’ai recueilli.

Où acheter le livre ?

A Questembert, on le trouve à la Papeterie Questembertoise, à la Maison de la presse, à Carrefour, Intermarché pour la (modique) somme de 14€.

Et aussi

  • Rochefort-en-Terre : Librairie Sainte-Hortense, Tabac-presse Danilo (Féerie d’Armoric)
  • Malansac : Tabac-presse Quémard
  • Redon : Librairie Libellune
  • La Gacilly : Librairie La Grande évasion
  • Saint-Jean-Brévelay : Librairie Les Hirondelles (nouvelle librairie, mais ils n’ouvrent qu’à la fin juin)

Ailleurs, on peut le commander chez son libraire ou directement chez l’éditeur.

Je serai à la Maison de la Presse samedi 5 juin (10h-12h30) pour une séance de dédicace.

La richesse des communes

Ma contribution sera plus modeste que celle d’Adam Smith sur La Richesse des Nations, mais il m’a semblé intéressant au moment où une nouvelle municipalité vient de prendre en main les affaires de notre commune de partager avec vous quelques réflexions sur les différents aspects de notre patrimoine. Le bulletin/magazine municipal n°13 de janvier-février 2020 y a consacré un dossier : Un héritage bien vivant ; et, de mon côté, j’avais invité mes lecteurs à ne pas confondre l’histoire du patrimoine avec le bureau des légendes.

Patrimoine naturel, patrimoine immatériel

Mais il n’y a pas que les Halles, les chapelles, les fontaines – qui méritent notre attention ; il faut aussi s’intéresser au patrimoine naturel, la biodiversité aussi bien que les paysages au croisement du pur naturel et de l’action humaine (le bocage, par exemple). Et ne pas oublier le patrimoine immatériel : pratiques de la vie quotidienne, parler gallo. Sans mélanger non plus l’amour du patrimoine et le folklore de carnaval.

Une coiffe gallèse
Une coiffe gallèse

Il n’est de richesse que d’hommes

J’ai bien souvent cité cette phrase de Jean Bodin, (1529-1596), un humaniste de la Renaissance. Sans doute faut-il la compléter pour la rendre plus claire :

« Il ne faut jamais craindre qu’il y ait trop de sujets, trop de citoyens : vu qu’il n’y a richesse, ni force que d’hommes : et qui plus est la multitude des citoyens (plus ils sont) empêche toujours les séditions et factions : d’autant qu’il y en a plusieurs qui sont moyens entre les pauvres et les riches, les bons et les méchants, les sages et les fous : et il n’y a rien de plus dangereux que les sujets soient divisés en deux parties sans moyens : ce qui advient ès Républiques ordinairement où il y a peu de citoyens. »

Retenons quand même que la vraie richesse ne réside pas que dans les biens matériels et que la force d’un pays vient de sa population. A ce titre, j’espère que nous aurons bientôt des données tirées du recensement de la population réalisé au début de l’année 2019. Nous n’avons eu aucune information sur le sujet. Faudrait-il en conclure que les résultats sont moins bons qu’espérés ?

Le capital fixe d’Adam Smith ou les « immobilisations corporelles et incorporelles »

S’il y a un recensement qui permet de faire le compte des richesses humaines, il y a aussi un inventaire des biens physiques, des  immobilisations corporelles et incorporelles ». Elles sont retracées dans la comptabilité communale, mais on y voit surtout les mouvements : nouvelles immobilisations, sorties d’inventaire. C’est pourquoi on devrait sans doute y insister plus précisément.

Pour préparer le débat sur les orientations budgétaires, les services de Questembert Communauté dressent chaque année des tableaux du foncier bâti, du patrimoine immobilier non bâti, et des autres immobilisations.

Tableau du patrimoine bâti de QC
Le tableau du patrimoine bâti de QC
QC Autres immobilisations et patrimoine foncieer
QC : les autres immobilisations et le patrimoine foncier



Un simple calcul montre que la valeur du patrimoine de Questembert Communauté est aux alentours de 34 M€. Évidemment, pour la Communauté, l’histoire est toute récente et il est facile de tenir l’inventaire des biens. C’est beaucoup plus compliqué pour la commune ! Et pour certains biens, il va être difficile d’en écrire la valeur : ainsi de l’église ou des chapelles, et même de l’ancienne école publique, rue Jean Grimaud.

Les services du Trésor ont permis un toilettage de l’inventaire, en proposant d’en supprimer des lignes obsolètes ; pourtant il serait intéressant que les conseillers, mais aussi les citoyens puissent avoir accès à ce document. Ce serait d’ailleurs un outil d’évaluation du travail de la municipalité : une sorte de point zéro au début du mandat (l’état de l’existant) et chaque année, l’accroissement – ou la réduction – du patrimoine. Par exemple, dans le mandat 2014-2020, le patrimoine communal s’est accru d’une école neuve (4,7 M€ HT), mais sur le même site, on a perdu un plateau sportif (peut-être sans valeur, mais il faut le noter quand même) ; la commune a agrandi son cimetière (acquisition et travaux pour un total de 200 K€ environ) et dans le même temps elle a rayé d’un trait les dépenses qui avaient été consenties pour le projet du Grand Célac 110 K€. Autre exemple : en 2018, la commune a revendu pour 45 K€ la maison Guillement acquise en 2007 pour 203 K€.

Mais aussi des espaces naturels propriétés communales

A côté des bâtiments ou d’équipements, il ne faut pas oublier des propriétés foncières sans utilisation directe. On ne parlera pas ici des terrains du Galinio dont les usages sont facilement perceptibles (terrains de sports, verger conservatoire), mais on attirera l’attention sur les propriétés communales autour de Célac. Ou bien encore sur les taillis de zones humides du côté de Tréfévan qui pourraient être valorisés en gestion durable pour la fourniture de bois énergie…

Autour de Célac, des propriétés communales
En plus du comping et de l’étang, plusieurs propriétés communales
Des taillis communaux du côté de Tréfévan
Plusieurs hectares de bois du côté de Tréfévan

Ces quelques exemples montrent l’intérêt d’affiner l’inventaire des biens communaux, surtout à un moment clé de l’installation d’une nouvelle municipalité. Quelle plus-value ou moins-value va-t-elle apporter à notre patrimoine commun ?