Nouveaux regards sur la fonction de maire

Devant l’assemblée générale de l’ARIC, à Plaintel, Rémi Lefebvre, politiste (Sc. Po. Lille), spécialiste des démocraties locales, s’interrogeait sur le statut social du maire, sur les conditions d’exercice du mandat, sur le rapport aux citoyens.

Nombreuses démissions de maires et d’élus municipaux, agressions verbales ou physiques, découragement de beaucoup : la fonction de maire, difficile, n’attire plus et certains craignent qu’il n’y ait plus de candidats. Rémi Lefebvre a tenu à élargir la focale sur le sombre tableau exposé par les médias. Avant de traiter trois points essentiels : la complexité croissante de la fonction, le nouveau rapport au mandat et le nouveau rapport des citoyens aux élus.

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Urbanisme, avec Philippe Schmit, ça décoiffe

Philippe Schmit, ancien secrétaire général de l’ACDF (Assemblée des Communautés de France), donnait une conférence devant l’assemblée générale de l’ARIC (Association Régionale pour l’information des collectivités) le 1er octobre à Quimperlé. Au centre de son intervention, une réflexion sur les enjeux de l’urbanisme face au changement climatique : les évolutions de la loi qui confère à l’État seul la définition de l’intérêt général, et les conséquences de ces évolutions sur les relations entre élus ainsi que les relations entre le maire et le pétitionnaire.

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Formation des élus : absolument nécessaire

Je suis très attaché à l’information du citoyen, qui doit pouvoir se faire une « opinion éclairée ». Ne négligeons pas cependant l’information et la formation des élus. En effet, l’élection donne aux élus la légitimité démocratique, mais ce n’est pas l’illumination de la Pentecôte : elle n’accorde pas les connaissances, les compétences nécessaires pour l’exercice des responsabilités. Si la formation est indispensable pour les nouveaux élus, et spécialement pour les nouvelles majorités, souvent portées par des novices sans expérience municipale, elle reste nécessaire pour tous.

Un droit établi par la loi Joxe de 1992

La loi Joxe Administration Territoriale de la République a plusieurs volets riches d’innovation : les prémisses de la démocratie participative, la création des communautés de communes, les droits de l’opposition dans les conseils, par exemple. Elle prévoit aussi le droit à la formation des élus... et le financement de cette formation sur le budget municipal.

Se former à quoi ?

Évidemment, on a vu un amuseur public se présenter sur une liste parisienne, et montrer une ignorance totale aussi bien de l’organisation générale de la capitale que des réalités pratiques de la vie des parisiens. Et il arrive ici et là que des zozos de ce genre arrivent aux commandes. Mais la plupart du temps, les élus désignés par le suffrage ont le sens de l’intérêt général et la volonté de bien faire.

Ils seront bien sûr soutenus par le personnel communal, et d’abord par les cadres (directeur/trice des services), accompagnés par les fonctionnaires de l’Etat (trésor public). Soutenus, accompagnés, pas pilotés, ils doivent maîtriser suffisamment les sujets sinon ce sont les technocrates qui garderont le pouvoir.

Leur autonomie leur impose des connaissances de base : savoir comment fonctionne un conseil municipal, ce que contient un budget communal, quels sont les partenaires de la commune (l’Etat, la Région, le Département, etc), comment se situer par rapport aux autres élus, aux citoyens.

Se former avec qui ?

Les élus plus expérimentés auront à cœur de partager leurs connaissances pour initier les nouveaux. Il sera pourtant nécessaire de faire appel à des spécialistes, à des professionnels. De nombreux organismes ont développé des programmes à destination des élus et sollicité l’agrément du ministère de l’Intérieur, condition nécessaire pour que la dépense puisse être prise en charge par la collectivité.

Chaque élu peut individuellement faire son marché dans les catalogues de ces organismes. Cependant, il peut être intéressant pour une collectivité de proposer des formations de base à l’ensemble du conseil municipal, pour un coût qui sera inférieur à la somme des stages individuels. D’ailleurs, si on se revendique de « démocratie participative », il est essentiel de permettre à tous les conseillers de partager les mêmes informations.

On y trouvera un autre avantage : élus de la majorité et de l’opposition seront à égalité dans ces connaissances de base et les débats y gagneront en qualité. Ajoutez à cela les moments de pause qui vont faciliter la fluidité des relations interpersonnelles.

Échange d’expériences


La formation peut ou doit aussi s’organiser au niveau de la Communauté de Communes, là encore pour des économies d’échelle et comme moyen de mieux intégrer tous les élus et pas seulement les délégués dans le projet communautaire.

La loi ATR de février 1992 posait les principes de la démocratie participative en ces termes : « Le droit des habitants de la commune à être informés des affaires de celle-ci et à être consultés sur les décisions qui les concernent, indissociable de la libre administration des collectivités territoriales, est un principe essentiel de la démocratie locale. »

N’est-ce pas une bonne idée de commencer en faisant vraiment participer les conseillers municipaux eux-mêmes et donc en leur en donnant les moyens ?

Quels organismes de formation?

Le ministère de l’Intérieur donne une liste de 206 organismes agréés, dont les 93 conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE). La plupart des universités proposent des formations. Les associations d’élus (associations des maires, par exemple) également.

En Bretagne, un cas particulier : l’ARIC, Association Régionale pour l’Information des Collectivités. Une association résolument démocrate et pluraliste, fondée en 1971 dans les Côtes d’Armor, à l’initiative d’un groupe d’élu.e.s autour de Sébastien Couëpel et de Pierre-Yvon Trémel, l’un démocrate-chrétien, l’autre socialiste. Administrée par des élus pour les élus, l’association n’a pas vocation à dégager des profits, ce qui lui permet de proposer des formations de qualité à des prix tout à fait compétitifs.

Une journée de formation  à Séné

Pendant la campagne, j’avais déjà insisté sur le devoir qui s’impose aux élus d’informer les citoyens dans l’article Informer, communiquer, une obligation pour les élus

Les maires au temps du coronavirus

Chaque jour ou presque, la presse locale nous montre l’action des maires face à la crise du coronavirus : ils/elles assument leur rôle de tout leur cœur. D’abord, parce qu’ils doivent assurer la continuité du service public, mais aussi parce qu’ils sont au plus près des attentes et des besoins de nos concitoyens, surtout des personnes isolées et fragiles.

En première ligne

En ces temps de défiance généralisée envers les « politiques » les maires sont les élus à qui les citoyens accordent encore une forte crédibilité. Comme on l’a vu de façon très nette aux élections du 15 mars : beaucoup de communes avec une seule liste – ce qu’on peut regretter – et lorsqu’il y avait plusieurs listes, les sortants ont souvent été réélus haut la main. Il y a bien sûr des exceptions.

Assurer la continuité des services publics, c’est d’abord répondre aux obligations de base pour l’Etat-civil, mais aussi maintenir la propreté de la ville, faire respecter les règles de confinement définies par le gouvernement et précisées par les arrêtés préfectoraux. Dans une période difficile comme celle-ci, les services sociaux sont en veille maximum : il faut éviter que le confinement nécessaire ne soit pas aggravé par l’isolement des personnes les plus fragiles: CCAS, services d’aide à domicile, mobilisation du voisinage (des voisins bienveillants, plutôt que des voisins vigilants!)

Les élus sont aussi attentifs aux effets économiques de la crise : soutien aux entreprises locales et spécialement aux petits commerces. Beaucoup ont sollicité avec insistance le préfet pour obtenir la réouverture des marchés de proximité. Ils se préparent aujourd’hui à la réouverture des écoles, après le 11 mai, début promis du déconfinement. Et ce ne sera pas simple.

Certains en font trop ?

Il est important que l’action des élus soit rendue visible aux habitants, à travers la presse, les réseaux sociaux, enfin les moyens de communication habituels. A Morlaix, par exemple, la maire s’adresse aux habitants presque une fois par semaine en vidéo, et la page FB de la ville de Morlaix est mise à jour très régulièrement. Il faut aussi que les élus soient présents sur le terrain. Comme le dit Gaëlle Berthevas, maire de St-Abraham, dans la lettre de l’ARIC : ce qui est essentiel c’est de « maintenir le contact, garder le lien, « être là » et savoir qu’ils peuvent compter sur nous et appeler à tout moment. »

Sans doute peut-on avoir l’impression que certains en font trop. Comme Lariflette, autrefois, dans Ouest-France, ils sont tous les jours dans le journal. Mais n’est-ce pas mieux que d’être presque aux abonnés absents ?

Les employés qui assurent

Les élus passent le message et c’est bien, mais derrière leur communication, il y a le travail dans l’ombre des employés communaux ou intercommunaux. Eh oui, des fonctionnaires ! Totalement engagés dans le service public. Et, somme toute, c’est justice qu’ils soient mis au premier plan de la communication. Comme dans cette interview du responsable du CCAS de Questembert aux Infos du Pays Gallo.

Fédérer les bonnes volontés: des exemples pour s’inspirer

Faire face à la crise, c’est mobiliser les ressources qui sont à disposition, ressources matérielles et ressources humaines. Mais les élus en responsabilité doivent aussi fédérer les bonnes volontés. Comme par exemple, en Ille-et-Vilaine, l’initiative emmenée par Marie-Pierre Vedrenne, députée européenne, pour relayer les solidarités citoyennes.

Ou bien encore, à Nantes, la maire Johanna Rolland, pourtant touchée elle-même, a fait le pari du rassemblement en proposant aux responsables des listes concurrentes de coopérer dans la réponse aux multiples problèmes que pose la pandémie.