Je sais les souffrances qui nous épuisent, les pesanteurs du passé qui nous entravent, les dangers qui nous menacent, les obstacles qui se dressent devant nous, je ne suis pas devenu lou ravi de la crèche (vous savez comme j’aime la tradition frelatée). Mais les déclinistes me lassent, les nostalgiques d’une époque rêvée qui, en réalité, n’a jamais existé, me saoulent, les collapsologues me feraient rire, les prophètes Philippulus battant leurs casseroles me brisent les oreilles.
Car je crois que, malgré tout, l’avenir n’est pas un destin tout tracé et nous pouvons le construire tous ensemble. 2022 sera ce que nous en ferons. Je vous propose pour 2022 de choisir l’optimisme. Avec ces quelques lignes d’un poème de Malherbe et ce tableau d’Arcimboldo, Vertumne, un dieu étrusque qui veillait à la fécondité de la terre, à la germination des plantes et à la maturation des fruits (merci wikipedia)
Nous ne reverrons plus ces fâcheuses années
Qui pour les plus heureux n’ont produit que des pleurs.
Toute sorte de biens comblera nos familles,
La moisson de nos champs lassera les faucilles,
Et les fruits passeront la promesse des fleurs.
Cette maladie, on ne s’en sortira jamais ?
Peut-être bien ! Et nous aurons sûrement encore en 2022 des malades à soigner, des morts à déplorer. Les conséquences seront lourdes pour le pays tout entier, même ceux qui échapperont à la contagion en subiront les effets. Mais nous apprendrons à vivre avec, en nous protégeant tous et chacun par les bons gestes, par les vaccins.
2022, c’est comme les vaccins, j’ai pas envie, on n’a pas assez de recul !
Et déjà, ces deux années difficiles ont été comme un révélateur des carences abyssales de notre société. À commencer par la situation dramatique de nos hôpitaux publics, une situation qui s’est dégradée depuis plus de 20 ans. Comme le montre cet article du Monde L’hôpital au point de rupture : une crise qui vient de loin.
Avec la crise de l’hôpital, nous avons pris conscience que nous avions laissé se dégrader nos services publics : l’éducation, et en particulier l’université, les transports, la justice.
La pandémie a aussi mis en lumière l’utilité sociale de ces travailleurs de l’ombre, souvent des travailleuses, soignants, auxiliaires de vie, et tous ceux qui restaient invisibles. Mal payés, mal traités, avec des contraintes lourdes (horaires, transports), ils ont droit à notre considération… et à une plus juste rémunération.
L’épidémie a été un révélateur des inégalités sociales et territoriales : nous l’avons perçu, et notre perception a été confirmée par de multiples analyses comme celle donnée dans cette synthèse.
La faute à qui ?
Ne faisons pas semblant de croire que tout cela est nouveau. La crise des Gilets jaunes – quoi qu’on pense de ce mouvement hétéroclite – avait déjà montré la profondeur du problème. Les « responsables » de la situation ont été vite dénoncés : on a dressé pour eux des guillotines sur les ronds-points et décapité des mannequins à leur effigie. Plus policés, d’autres leaders politiques ont prôné la guillotine politique, la révocation immédiate des élus qui auraient « trahi » leurs engagements…
La même violence se manifeste de plus en plus aujourd’hui au point de rendre difficile tout débat raisonnable. Comme on le voit dans ce tweet adressé récemment à une députée.
Du délire, direz-vous, sans doute, mais les bouffées délirantes préparent quelquefois le passage à l’acte. Surtout que le délire est entretenu par les discours de penseurs qui tiennent des tribunes sur les plateaux télés ou dans les meetings politiques, d’influenceurs qui sévissent sur la toile.
Les plus ésotériques incriminent les acteurs de l’ombre, les illuminati reptiliens ! Plus raisonnables, d’autres accusent les lobbys à l’œuvre derrière toute action publique, une cause qu’on ne peut pas écarter totalement d’un revers de main, bien qu’il faille y mettre quelque nuance (les nuances, ce n’est pas très à la mode). Un sujet que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer dans cet article Des responsables peu responsables, des citoyens sans civisme.
Convoquant l’histoire de la France éternelle, d’autres désignent un bouc émissaire bien commode, l’immigrant, surtout quand il a le culot de se réclamer d’une autre religion. Et là, non seulement, vous avez la cause de tous nos malheurs, mais la solution pour demain : « si nous en sommes là, c’est parce que la France n’a pas su se protéger, menée par des politiciens qui l’ont trahie ; si nous voulons redresser notre pays, il faut revenir au monde d’avant. » Outre que ce monde rêvé n’a jamais vraiment existé, cette nostalgie nous fait ruminer le passé, nous appelle à regretter plutôt qu’à construire ensemble un avenir commun, qui n’oubliera rien de ce que nous savons de l’histoire, mais qui sera fondé sur l’optimisme de la volonté et de l’action.
L’État, c’est nous
Je veux aussi rappeler que nous avons tous et chacun notre part de responsabilité dans la situation que nous vivons maintenant. Face à l’épidémie de COVID, sans doute : nous tâtonnons ensemble à la recherche de solutions. Mais surtout, pour le tableau dégradé qu’a révélé la pandémie : les décisions ont été prises par les dirigeants que nous avons successivement élus démocratiquement. Ils nous ont menti ? Même pas, nous n’avons pas su confronter leurs promesses au réel. Ils nous ont trahi ? Non, la plupart du temps : ils ont réduit les impôts comme ils l’avaient promis, comme nous l’avions en quelque sorte demandé, et ainsi, nous avons avec eux asséché les ressources des services publics qui nous manquent aujourd’hui.
Nous aurons cette année l’opportunité d’affirmer que, vraiment, l’État, c’est nous. Mais cela suppose que nous sachions nous garder aussi bien des tentations nostalgiques et de la peur fantasmée de la submersion de notre pays que des ivresses d’un possible grand soir qui nous ouvrirait les portes béantes d’un avenir radieux. Cela suppose que nous soyons des citoyens informés, éclairés, conscients des problèmes réels.
Le pacte du pouvoir de vivre
Très concrètement, pour assumer que l’État, c’est nous, je vous invite à découvrir les 90 propositions du pacte de pouvoir de vivre, à télécharger ici.
Et dès maintenant, partageons les vœux des acteurs du pacte du pouvoir de vivre :
Toujours intéressant le blog « Un regard de citoyen de « Paul Paboeuf
Riche d’informations avec un regard aiguisé sur la vie locale et la société , cette initiative nous instruit.
A lire et à imiter
Robin