Open data, outil pour la démocratie

Open data, c’est quoi donc ? On peut traduire : « données ouvertes ». Mais encore? C’est la possibilité pour chacun d’accéder aux données publiques, plus précisément aux données issues de l’activité publique, données qui le plus souvent ont été financées par le citoyens à travers les tarifs ou l’impôt local.

Du secret des administrations, à l’action de la CADA, et à l’obligation de rendre accessibles les données



Le chemin parcouru a été bien long depuis l’affirmation de la déclaration des droits de l’homme de 1789 qui dans son article 15 affirme : La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.

D’abord, il y eut le secret : Circulez, y a rien à voir ou Dormez, braves gens, on s’occupe de tout. Le temps des affaires réglées entre gens de bonne compagnie, parfois entre copains et coquins. Avec pour conséquence, une méfiance justifiée du citoyen envers des instances opaques. Alors oui, on pouvait dire « on nous cache tout, on nous dit rien. »

Il faut attendre la loi du 17 juillet 1978 qui a instauré un droit d’accès des citoyens aux documents administratifs. Ainsi, toute personne a le droit d’obtenir communication des documents détenus par une administration dans le cadre de sa mission de service public, quels que soient leur forme ou leur support.

Théoriquement ! Parce qu’en pratique, c’était quelquefois plus compliqué. Ainsi dans une commune de la périphérie vannetaise, le groupe d’opposition avait dû louer une photocopieuse et un groupe électrogène, installés devant la mairie, pour obtenir copie des délibérations, des budgets, qui sont pourtant des documents publics.

Plus récemment, j’ai dû pour ma part solliciter en 2014 la CADA (Commission d’Accès aux Documents Administratifs) pour obtenir communication de la fiche DGF de la commune, car l’adjoint m’avait répondu :  » Un tel document est confidentiel et, en conséquence, nous ne pouvons faire suite à votre demande. » Évidemment, il s’agissait d’un document public. Peut-être l’adjoint l’ignorait-il lui-même. Mais, la plupart du temps, le citoyen peut être découragé par les obstacles qu’on dresse devant lui. Et renoncer à une information utile.

Cet adjoint était bien en retard sur son temps, sur notre temps.

Des données ouvertes, une attente citoyenne, sanctionnée par la loi

Les données ouvertes sont désormais un principe admis qui répond à une attente citoyenne. Avant d’être inscrit dans la loi « Pour une république numérique,«  préparée par Axelle Lemaire en 2016 (non, ce n’est pas la sœur de Boris!), le principe a été formalisé en France par la mission ETALAB (2011) et le portail data.gouv.fr. Mais dès 2010, les villes de Rennes et de Paris ont initié une démarche open.data

Plus près de nous, le syndicat départemental Morbihan Énergies a lancé son portail de données ouvertes. Voir ci-dessous la page d’accueil.

La page d’accueil du portail open data de Morbihan énergies.

La page d’accueil du portail est alléchante : elle souligne les 3 objectifs visés avec en premier lieu, celui de rendre l’action publique plus compréhensible par les citoyens. Mais ce qui est proposé à ce jour est encore décevant… Le service le plus recherché est la cartographie des points de recharge des véhicules électriques. Récemment, la ville de Lorient a mis en ligne les stationnements particuliers (PMR par exemple). La commune de Béganne, quant à elle, a mis en ligne ses budgets 2017 et 2018. Des progrès à faire donc.

Du côté de Rennes Métropole, il y a aussi à faire : si vous vous intéressez au PLUi du territoire métropolitain, vous pouvez télécharger un fichier de 217 Mo au format gpkg, un format ouvert, sous licence libre, mais…

On comprend l’intention louable de la loi « pour une République numérique ». La mise en œuvre reste complexe.

Une médiation nécessaire, mais premières étapes faciles à atteindre

Pour recueillir pleinement les effets positifs de l’ouverture des données, il faut probablement un accompagnement, une médiation pour que les citoyens puissent profiter de l’information offerte et pour que la démocratie soit plus vivante, plus participative.

Cependant, les communes et les communautés peuvent facilement faire un effort pour que les données de base soient accessibles : elles disposent presque toutes de sites internet, de newsletters. Quoi de plus facile que diffuser régulièrement l’information nécessaire au grand public. Bien sûr, la plupart mettent en ligne les comptes-rendus des conseils, les budgets, les rapports d’activités. Mais quoi de plus rébarbatif qu’une délibération formelle qui retrace les liens avec les lois et règlements ? Il faudrait remettre tout ça dans le contexte, exposer les enjeux, montrer comment telle action s’inscrit dans un projet global.

Tout cela impose une réflexion approfondie sur le message à transmettre, du travail complexe des spécialistes, mais c’est à ce prix qu’on pourra faire mieux vivre la démocratie : des citoyens qu’on respecte parce qu’ils sont informés, des élus qui sont respectés parce qu’ils prennent le temps d’expliquer ce qu’ils font.

Regards citoyens fait la promotion de l’open data

Pour aller plus loin, avec l’association Regards Citoyens

Créée en 2009, l’association est constituée de citoyens de tous âges et régions, tous bénévoles, qui se sont rencontrés sur Internet dans un désir commun de proposer un accès simplifié au fonctionnement de nos institutions démocratiques à partir des informations publiques.

Sur le site de Regards Citoyens, vous pourrez trouver des informations sur l’activité de nos députés et de nos sénateurs. Et bien sûr, c’est notre sujet du jour, la promotion de l’open data.

Formation des élus : absolument nécessaire

Je suis très attaché à l’information du citoyen, qui doit pouvoir se faire une « opinion éclairée ». Ne négligeons pas cependant l’information et la formation des élus. En effet, l’élection donne aux élus la légitimité démocratique, mais ce n’est pas l’illumination de la Pentecôte : elle n’accorde pas les connaissances, les compétences nécessaires pour l’exercice des responsabilités. Si la formation est indispensable pour les nouveaux élus, et spécialement pour les nouvelles majorités, souvent portées par des novices sans expérience municipale, elle reste nécessaire pour tous.

Un droit établi par la loi Joxe de 1992

La loi Joxe Administration Territoriale de la République a plusieurs volets riches d’innovation : les prémisses de la démocratie participative, la création des communautés de communes, les droits de l’opposition dans les conseils, par exemple. Elle prévoit aussi le droit à la formation des élus... et le financement de cette formation sur le budget municipal.

Se former à quoi ?

Évidemment, on a vu un amuseur public se présenter sur une liste parisienne, et montrer une ignorance totale aussi bien de l’organisation générale de la capitale que des réalités pratiques de la vie des parisiens. Et il arrive ici et là que des zozos de ce genre arrivent aux commandes. Mais la plupart du temps, les élus désignés par le suffrage ont le sens de l’intérêt général et la volonté de bien faire.

Ils seront bien sûr soutenus par le personnel communal, et d’abord par les cadres (directeur/trice des services), accompagnés par les fonctionnaires de l’Etat (trésor public). Soutenus, accompagnés, pas pilotés, ils doivent maîtriser suffisamment les sujets sinon ce sont les technocrates qui garderont le pouvoir.

Leur autonomie leur impose des connaissances de base : savoir comment fonctionne un conseil municipal, ce que contient un budget communal, quels sont les partenaires de la commune (l’Etat, la Région, le Département, etc), comment se situer par rapport aux autres élus, aux citoyens.

Se former avec qui ?

Les élus plus expérimentés auront à cœur de partager leurs connaissances pour initier les nouveaux. Il sera pourtant nécessaire de faire appel à des spécialistes, à des professionnels. De nombreux organismes ont développé des programmes à destination des élus et sollicité l’agrément du ministère de l’Intérieur, condition nécessaire pour que la dépense puisse être prise en charge par la collectivité.

Chaque élu peut individuellement faire son marché dans les catalogues de ces organismes. Cependant, il peut être intéressant pour une collectivité de proposer des formations de base à l’ensemble du conseil municipal, pour un coût qui sera inférieur à la somme des stages individuels. D’ailleurs, si on se revendique de « démocratie participative », il est essentiel de permettre à tous les conseillers de partager les mêmes informations.

On y trouvera un autre avantage : élus de la majorité et de l’opposition seront à égalité dans ces connaissances de base et les débats y gagneront en qualité. Ajoutez à cela les moments de pause qui vont faciliter la fluidité des relations interpersonnelles.

Échange d’expériences


La formation peut ou doit aussi s’organiser au niveau de la Communauté de Communes, là encore pour des économies d’échelle et comme moyen de mieux intégrer tous les élus et pas seulement les délégués dans le projet communautaire.

La loi ATR de février 1992 posait les principes de la démocratie participative en ces termes : « Le droit des habitants de la commune à être informés des affaires de celle-ci et à être consultés sur les décisions qui les concernent, indissociable de la libre administration des collectivités territoriales, est un principe essentiel de la démocratie locale. »

N’est-ce pas une bonne idée de commencer en faisant vraiment participer les conseillers municipaux eux-mêmes et donc en leur en donnant les moyens ?

Quels organismes de formation?

Le ministère de l’Intérieur donne une liste de 206 organismes agréés, dont les 93 conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE). La plupart des universités proposent des formations. Les associations d’élus (associations des maires, par exemple) également.

En Bretagne, un cas particulier : l’ARIC, Association Régionale pour l’Information des Collectivités. Une association résolument démocrate et pluraliste, fondée en 1971 dans les Côtes d’Armor, à l’initiative d’un groupe d’élu.e.s autour de Sébastien Couëpel et de Pierre-Yvon Trémel, l’un démocrate-chrétien, l’autre socialiste. Administrée par des élus pour les élus, l’association n’a pas vocation à dégager des profits, ce qui lui permet de proposer des formations de qualité à des prix tout à fait compétitifs.

Une journée de formation  à Séné

Pendant la campagne, j’avais déjà insisté sur le devoir qui s’impose aux élus d’informer les citoyens dans l’article Informer, communiquer, une obligation pour les élus