La fabrique et la diffusion d’un fake

Sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, mais aussi dans certains médias très suivis, les fake news – les fausses nouvelles – prolifèrent. Avec quelquefois le soutien actif de personnalités publiques, qui pourtant prétendent assurer un jour des responsabilités nationales. J’essaie pour ma part de confronter ces fausses nouvelles avec des informations vérifiées, en utilisant les ressources que mettent à notre disposition les outils numériques. Une expérience récente m’a mis sous les yeux la fabrication et la diffusion d’une fausse nouvelle. C’est presque un cas d’école.

La page 132 du rapport de Pfizer sur son vaccin anti-COVID 

Les antivax se répandent sans retenue sur les réseaux sociaux, appuyés souvent par des scientifiques indépendants (?). Un de mes vieux amis, et pas seulement sur FB, bien marqué à gauche, même extrême, relaie, à partir d’un post d’un ami à lui, diffuse l’image suivante :

Le post d’un lanceur d’alerte sur FB

Cette image est accompagnée du commentaire suivant : Pour info, dans la notice publiée par Pfizer de son vaccin, ces derniers reconnaissent qu’il pourrait y avoir un risque de bébés génétiquement défectueux suite à l’injection de ce vaccin et recommandent donc l’abstinence sexuelle pendant un mois après la deuxième injection… oui c’est bien Pfizer qui le dit.

Et pour que chacun soit persuadé de la véracité de l’image comme du commentaire, nous avons droit au lien internet vers la notice de Pfizer. https://pfe-pfizercom-d8-prod.s3.amazonaws.com/2020-11/C4591001_Clinical_Protocol_Nov2020.pdf?fbclid=IwAR3iW0TZbO8BAE5vXvb8slG_neJTDmJY9

Si vous avez quelques doutes, vous cliquez sur le lien… et vous avez un document de 146 pages, en anglais… Ça décourage, mais bon, on y va. Directement à la page 132

La page 132

Et oui, il y est bien question d’abstinence sexuelle, de préservatifs pendant 28 jours pour éliminer les risques sur la sécurité reproductive (eliminate reproductive safety risk). Mais contrairement à ce que dit l’image, il n’y est jamais question de births defects due to genetic manipulation (handicaps à la naissance provoqué par des manipulations génétiques). Manipulation génétique, non, mais manipulation d’information, sans aucun doute.

A partir de cette information, les commentaires et les partages vont bon train. La fausse information provoque l’indignation : « ils font ce qu’il faut pour se protéger, ces raclures »; Surtout que les medias, forcément « mainstream, » forcément corrompus n’en parlent pas: « Et ça dans les infos traditionnelles personne n’en parle ».. Avec quelquefois une question raisonnable de quelqu’un qui est allé voir le document : « Je ne vois pas où il est question de manipulations génétiques, page 132. C’est où? » Et quand même là une réponse raisonnable : « Nulle part, évidemment. »

Une lecture erronée ou une volonté d’embrouiller ?

Si l’on va regarder tout le document, mais pas seulement la page 132, on découvre que ce n’est pas du tout la notice du vaccin… mais la description des protocoles suivis pour les tests de phases 1, 2 et 3 (c’est quoi ça ? Allez voir l’explication ici). En effet, dans les protocoles, il est prévu d’éviter de prendre dans les personnes à tester celles qui peuvent user de leurs fonctions reproductives.

Cette page 132 est devenue virale sur la toile dans la bulle des antivax depuis la fin décembre… et l’information a été notée comme fausse par SNOPES l’équivalent américain de Hoaxbuster (un site à consulter systématiquement). Voir ici l’article de Snopes.

Alors se pose la question : le prétendu lanceur d’alerte a-t-il mal lu, mal compris, ou simplement compris ce qu’il espérait lire, ce qu’on appelle le biais de confirmation ? Dans ce cas, on a juste un exemple de ce que décrivait Umberto Eco: « Les réseaux sociaux ont donné le droit à la parole à des légions d’imbéciles qui avant ne parlaient qu’au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd’hui ils ont le même droit de parole qu’un prix Nobel. C’est l’invasion des imbéciles. »

Il y a malheureusement une autre hypothèse : le lanceur d’alerte pense que tout est bon pour faire valoir son point de vue antivax, contre les big-pharma. Et ne s’embarrasse pas de la vérité. Une autre de ses publications me fait pencher pour cette hypothèse.

UN autre post du lanceur d’alerte, un autre fake



Dans cette copie d’écran, on voit qu’il prétend se référer à  un organisme américain, le Vaccine Adverse Event Reporting System, un programme de sécurité des vaccins, cogéré par les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis et la Food and Drug Administration. Dont il dit avoir tiré ces données alarmantes : 147 morts, 769 cas d’amnésie… etc. Là encore, avec juste un peu de patience et de méthode, sur le site du Vaccine Adverse for Disease Control and Prevention, on ne trouve rien de cela. . Les effets secondaires sont bien recensés dans cet article de Sciences et Avenir . Notre lanceur d’alerte me fait penser à Philippulus, le prophète dans Tintin, L’Île mystérieuse. Malheureusement, nous ne sommes pas dans le monde de la BD !

Merci à Tintin (je n’ai pas encore 77 ans)

Des responsables peu responsables, des citoyens sans civisme

La crise sanitaire que nous vivons a été une vraie révélation pour moi. Je savais déjà qu’en matière de football, nous avions chez nous presque autant d’entraîneurs/sélectionneurs que d’habitants, en tout cas autant que de téléspectateurs sur leur canapé, la bière dans la main gauche et le paquet de chips dans la main droite. J’ai découvert avec la pandémie du COVID-19 que nous avons aussi 50 millions de spécialistes en virologie, infectiologie, en santé publique, et bien sûr en futurologie. Je savais qu’il y en avait beaucoup au comptoir des bistrots – au temps où ils étaient ouverts ; j’ignorais qu’ils étaient aussi nombreux parmi les responsables politiques et chez les philosophes ou politistes patentés, parfois encouragés par d’authentiques savants.

Couvre-feu

Une grippette saisonnière ? Mais y a plus de saisons

Rappelez-vous, c’était seulement une « grippette » saisonnière qui allait nous laisser en repos dès que viendraient les beaux jours. Rien de tel qu’un peu d’hydroxychloroquine avec une pincée d’azithromycine – c’est bon pour tout – pour dissiper la fièvre. Et encore chez nous, on a échappé à la purge proposée par le président Trump, le commander in chief, lui aussi promu infectiologue/virologue : il suggérait de se faire des inhalations à l’hypochlorite de potassium (solution à 4 % NaCI + H2O + NaCIO). Si Richard Anthony était encore de ce monde (oui, on va me dire OK boomer!), il nous proposerait certainement son Sirop Typhon, dont on ne savait si c’était du mir-vaisselle panaché ou l’universelle panacée….

Les mêmes grands spécialistes nous ont dit que non, non, il n’y aurait pas de deuxième vague. Puisque c‘était une grippe saisonnière. Mais, comme vous le savez, y a plus de saisons… Quand la deuxième vague est arrivée, ils ont reproché aux autres de ne pas l’avoir prévue, ni anticipée.

A leur décharge, il faut dire que du côté du gouvernement, on n’a pas été bien malin : les masques étaient inutiles… puisqu’on n’en avait pas. Sur ce sujet, comme sur bien d’autres, la vérité d’un jour était une erreur le lendemain, avant de revenir le jour d’après.

Enfin chacun avait la bonne idée, la seule bonne solution, les autres avaient tout faux. Et l’on a entendu plusieurs de ces porte-parole autoproclamés des chefs de cliniques. Avec des changements de costume à vue : face, vous aviez une prestigieux chef des urgences d’un grand hôpital parisien, et pile, le même devenait un poids lourd du parti Les Républicains, complètement objectif sur le sujet, sans doute.

La COVID à pépère ? Gouverner par la peur ?

A côté des criailleries politico-scientifiques, nous avons eu droit aussi aux hypothèses les plus délirantes du grand complot. Passons sur ceux qui ont raconté que ce virus e était une invention maléfique des Chinois, de l’Institut Pasteur, du lobby du nouvel ordre mondial à la botte de Bill Gates et de Big Pharma. Moins ésotérique, mais aussi insidieuse était l’affirmation que cette maladie, somme toute bénigne (en tout cas tant qu’on ne l’a pas eue, n’est-ce pas M. Onfray?) était le moyen pour instiller la peur chez les pauvres gens afin de les manipuler et de les soumettre à une dictature douce. « Allons, ne soyez pas des moutons dociles, le pouvoir profite de la pandémie pour vous priver de vos libertés .»

D’ailleurs, la preuve : la maladie touche principalement les vieux, c’est le COVID à pépère, et les vieux sont et seront les électeurs les plus dociles… si on leur fait bien peur ! Etant moi-même assez avancé en âge, je dois dire que je n’ai pas trop peur pour moi ! Après tout, on verra bien. J’ai cependant pris quelques précautions au cas où : j’ai rédigé mes directives anticipées  pour éviter de finir ma vie à l’état de légume, comme Vincent Lambert.

Pour moi, c’est assez clair, mais autour de moi, il y a des gens que j’aime, plus âgés ou moins. Et j’aimerais bien les garder.

La misère des hôpitaux, les carences des EHPAD 

La crise sanitaire est un formidable révélateur de notre système de santé. Qui manque sérieusement de moyens tant en équipements qu’en personnel. Les gouvernants d’aujourd’hui ont leur part de responsabilité : le 3 avril de cette année, le directeur de l’ARS du Grand-Est estimait qu’il n’y avait pas lieu de remettre en cause la suppression sur cinq ans de 174 lits (sur 1 577 en 2018) et de 598 postes au CHRU de Nancy (sur environ 9 000) !

Pourtant, la misère des hôpitaux ne date pas d’hier, elle tire son origine principalement du mode de financement instauré en 2004, la T2A, la Tarification À l’Activité. Dans un assez large consensus des politiques de l’époque ! La T2A a conduit à la course à la rentabilité, au détriment de la prévention, par exemple.

Tout cela s’inscrivait dans un contexte de réduction des dépenses publiques (la RGPP!). Un exemple parmi d’autres : dès 2007, Eric Woerth, député LR de l’Oise, alors ministre du budget affirmait qu’il y avait trop de lits à l’hôpital et il récidivait en 2014. Voir cet article du Quotidien du Médecin.

Il y avait donc chez nos politiques, avec quelques nuances, un relatif consensus pour réduire la dépense publique. Je dis bien chez nos élus, car nous les avions choisis démocratiquement. Persuadés que nous étions, presque tous, que nous payions trop d’impôts ! Et qu’il fallait pour baisser les impôts, baisser les dépenses. Enfin pour préciser, nous étions presque tous d’accord pour qu’il y ait plus d’impôts… pour les autres.

En salle de réa (vidéo AP-HP)



Les vieux sont les premières victimes de l’épidémie. Et la plus forte concentration de vieux, c’est dans les EHPAD, les maisons de retraite. D’où, les risques de propagation rapide de la maladie. Le bon monsieur Ciotti a découvert tout à coup cette situation dramatique. « On a laissé mourir les vieux », s’indignait-il au mois d’avril. Et au terme de la mission parlementaire d’enquête qu’il a conduite, il étrille la gestion de la crise par le gouvernement et fait des préconisations de bon sens : les EHPAD sont insuffisamment médicalisés (pas assez de médecins, d’infirmiers, de soignants). Il ne dit pas où il trouvera l’argent pour ça, mais après tout, il n’est que député d’opposition. Irresponsables responsables.

Confiner… les autres

Tout le monde a à peu près compris que moins on a de contacts, moins on risque la contamination. Le confinement, plus ou moins strict, a montré son efficacité : il ralentit la dispersion du virus, sans l’arrêter, car le virus est toujours là, et, quoi qu’on fasse, il faudra qu’il n’y ait plus assez de cibles pour sa propagation, c’est-à-dire quand une majeure partie de la population sera immunisée (plus de 60%) , soit pour avoir été touchée par le virus, soit par la vaccination. A ce jour, selon l’Institut Pasteur cité par BFMTV, à peine plus de 10 % des Français ont été touchés (sans forcément avoir été malades), avec des variations régionales : 3,6 % en Bretagne et 21,3 % en Ile-de-France.

Il faudrait donc maintenir le confinement, mais j’ai l’impression que le confinement, comme les impôts, c’est bien… pour les autres. Chacun a de bonnes raisons pour justifier que son activité n’est pas plus dangereuse que telle autre, que le service qu’il rend est au moins aussi essentiel que tous ceux qui sont ouverts. Et chaque intérêt particulier va trouver un interprète officiel qui va nous montrer qu’il s’agit de l’intérêt général, et que les arbitrages rendus ne sont pas les bons.

Moi aussi d’ailleurs, je trouve que ce serait bien d’aller au cinéma, de retrouver les copains au bistrot, de faire un bon dîner dans un restaurant sympathique… J’attendrai !

Joue-la comme Zidane, euh comme Merkel

Nos nombreux experts en santé publique sont prompts à nous trouver des exemples de bonnes solutions. Assez peu cependant se sont risqués à nous proposer de suivre la conduite de Trump ou de Bolsonaro, mais on a entendu la petite musique nous invitant à attendre l’immunité de groupe (la herd immunity, l’immunité du troupeau, selon la délicate expression de Boris Johnson). Plus généralement, on a cité le bon exemple de la Suède, et voilà que ça marche moins bien. L’Allemagne aussi s’en sortait mieux, mais aux dernières nouvelles, la situation s’est dégradée dramatiquement.

Alors soyons prudents, pour nous et pour les autres, sans céder à la panique, ni croire aux balivernes des gourous et faux prophètes (malgré leur barbe fleurie) et méfions-nous des yaka-faukon : la situation est bien trop complexe pour les réponses simplistes.

Action sociale : les grandes orientations de Jeannine Magrex

Deuxième adjointe auprès de Boris Lemaire, Jeannine Magrex est en charge de l’action sociale, vaste domaine puisque les services s’intéressent à la petite enfance et aux personnes âgées en passant par les familles monoparentales et par l’aide aux personnes en difficulté. Elle nous expose ici ses grandes orientations.

L’action sociale pour une commune, c’est un champ très vaste, quelles priorités souhaites-tu mettre en avant?

L’action sociale pour une commune, c’est un certain nombre d’obligations légales, mais pour nous, c’est une exigence morale et un engagement politique. Dans notre projet municipal, nous avons listé les grands axes de notre programme.

  • Redéployer l’aide au maintien à domicile pour les personnes âgées
  • Valoriser l’insertion des seniors dans la vie collective
  • Soutenir les aidants auprès des personnes dépendantes
  • Favoriser l’inclusion numérique
  • Repérer et accompagner les familles monoparentales et spécialement les parents isolés
  • Participer à l’intégration des jeunes en difficultés en lien avec les associations présentes sur le territoire
Les bureaux du CCAS
Le CCAS est désormais dans le bâtiment de l’hôtel de ville

Notre début de mandat est fortement impacté par la période pandémique que nous connaissons depuis le printemps. Cette situation mobilise les équipes qui doivent s’adapter continuellement à l’évolution sanitaire. En première ligne, les 18 agents de notre service d’accompagnement et d’aide à domicile, le SAAD. Nous devons être présents auprès de nos agents et accompagner nos bénéficiaires au quotidien durant la crise sanitaire. Le conseil municipal a, dès le mois de juillet, décidé d’attribuer la prime covid aux agents mobilisés durant la période de confinement.

Nous avons aussi la responsabilité de la résidence autonomie, le foyer logement : pour préserver nos 27 résidents (+ un hébergement temporaire), il nous faut assurer une veille sanitaire stricte en respectant les protocoles réglementaires mais en leur permettant de maintenir le lien avec leurs familles et leurs proches.

La maison de retraite du Bois Joli et le SSIAD (Service de Soins Infirmiers à Domicile) qui y est rattaché ne sont pas directement de notre ressort. Mais le maire est président du Conseil d’Administration et j’y suis également en tant que déléguée de la commune. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une compétence communale, nous nous devons d’être présents et actifs auprès de cette structure d’accueil primordiale sur notre territoire.

Les aides directes aux gens en difficulté, ça se passe comment ? Quel montant cela représente-t-il ?

Une très petite somme au global (moins de 10 000 € sur une année), un coup de pouce pour payer l’eau, l’électricité ; les bénéficiaires (environ une soixantaine par an) de ces aides ne sont pas uniquement des personnes en situation de précarité, car pour certains malgré des revenus réguliers, le coût des logements inconfortables, mal isolés pèse sur le budget. La précarité énergétique, ça veut dire quelque chose ! Ces aides décidées en conseil d’administration du CCAS – selon des règles strictes – sont cofinancées par le département, les fournisseurs d’eau et d’énergie.

Et les associations caritatives ?

Plusieurs associations caritatives sont présentes à Questembert, mais leur rayon d’intervention dépasse souvent la commune : Croix rouge, restos du cœur, secours catholique, banque alimentaire, le Relais Jeunes 56. Elles sont représentées au Conseil du CCAS, mais le nombre de membres, limité, ne permet pas de les accueillir toutes. Cependant, il est bien évident que nous devons créer du lien avec l’ensemble des bonnes volontés présentes sur notre territoire.

L’Analyse des Besoins Sociaux (ABS), démarche que nous venons d’engager, sera l’occasion de dresser notre auto-portrait socio-démographique en invitant les différents acteurs à nous rejoindre dans cette démarche.

Les associations sont animées par des bénévoles, quelles relations veux-tu établir avec eux ?

Notre territoire est riche de bonnes volontés par l’intermédiaire des différentes structures associatives que nous ne remercions jamais assez pour le travail accompli. Par exemple, notre local d’urgence ne pourrait être ouvert sans des bénévoles fortement impliqués.

Mon souhait est de pouvoir travailler main dans la main avec les associations locales, nous n’avons pas chacun ses pauvres mais sommes complémentaires pour accompagner les personnes en difficultés.

L’un des objectifs en début de mandat est de prévoir un logement d’urgence permettant l’accueil de familles en situation de détresse.

Et pour les personnes en situation de handicap, quelle peut être l’action municipale ?

D’abord, il y a l’obligation réglementaire de l’accessibilité : bien sûr nous allons poursuivre la mise en œuvre des AD’AP et PAVE ; mais nous devrons intégrer le handicap tout au long de nos projets.

Le comité accessibilité est désormais constitué et nous allons réfléchir collectivement à cette problématique et favoriser l’intégration de tous les handicaps.

Budget communal, des questions à Maxime Picard, adjoint aux finances

Lundi 29, le conseil municipal a voté, à l’unanimité !, le budget 2020. Avec des mois de retard en raison de la crise sanitaire. Un budget de transition, puisque l’année est bien avancée. Maxime Picard, adjoint en charge des finances, a répondu à mes questions.

Tu viens de prendre tes fonctions d’adjoint aux finances, dans quel état as-tu trouvé les finances de la commune ?

Les finances de la commune sont correctes ! Conseiller d’opposition, je l’avais dit au mois de février lorsqu’on a examiné le compte administratif ! C’est trop souvent une tentation pour les nouveaux élus de prétendre que la situation financière de la commune où on vient de prendre les commandes est catastrophique, souvent c’est même un argument de campagne. Rappelle-toi ce que disaient Mme Martin et ses amis en 2014 : surendettement, cavalerie financière. Rien de tout cela n’était vrai. Moi, je fais un constat honnête : la ville a été bien gérée du strict point de vue financier.

Nous n’aurions pas fait les mêmes choix et nous avons exprimé notre opposition chaque fois que nécessaire : sur la baisse – très démagogique – des taux de la taxe d’habitation, sur la suppression de l’abattement général à la base. Mais techniquement, les finances communales ont été bien gérées, et parfois même trop bien au détriment de l’activité des services.

S’il y avait 3 idées forces à retenir de ce budget que tu as présenté…

Sur les recettes, nous tenons à la baisse des tarifs de l’école de musique. Nous croyons dans cette école et nous refusons la logique actuelle qui, avec le confinement, engrainerait une possible disparition de cet outil central d’une politique culturelle. Or notre école était trop chère. Je ne comprends pas ceux qui se sont opposés à ce choix de diminution de 10% ! Notre projet est d’améliorer le service rendu à la population. Si un tarif rend un service inaccessible, il faut le baisser.

Ensuite, ce budget est marqué par la crise sanitaire : travaux qui n’ont pu avoir lieu, achats de matériels de protection, primes pour les agents qui se sont retrouvés en première ligne, et des déséquilibres en hausse du fait de l’arrêt de services « tarifés » (cantine scolaire, multi-accueil, aides à domicile, école de musique).

Enfin, nous voulions envoyer des signaux forts pour le commerce local et la culture. Nous renforçons la programmation culturelle estivale dans la limite de ce que les normes sanitaires nous permettent. Expos photos avec un circuit de déambulation pour commencer !

Les recettes fiscales vont-elles s’accroître ?

Oui, sans augmentation des taux, et c’est une décision politique. Les bases fiscales s’accroissent et nous permettent d’attendre une recette de 4439 K€, une progression de 1,6 %. Comme Boris Lemaire et moi l’avons rappelé en séance, augmenter la fiscalité d’une population globalement modeste dans une période de crise, ça n’aurait aucun sens. Donc nous nous en tenons à la marge que constituent la « hausse des bases » et la dynamique démographique.

Et les dotations de l’Etat ?

Elles vont augmenter de 55 K€, 1671 K€ contre 1616 K€ en 2019. . Evidemment, on aimerait avoir plus, mais…. Cela représente à peu près de 20 % de nos recettes, et dans les communes comparables, c’est plutôt 13-14 %.

Quelles sont les principales dépenses ?

Notre budget de fonctionnement est constitué pour moitié des salaires de nos agents. Cette masse salariale diminue légèrement cette année du fait de recrutements ralentis par la crise sanitaire. Et c’est un problème sur certains postes sensibles, car la « production » de nos services, ce sont autant de prestations en moins à faire effectuer par d’autres organismes.

Sur le reste du fonctionnement, il faudra attendre les chiffres précis à la fin de la crise sanitaire. Globalement, on s’attend à une forte augmentation du déficit du CCAS. Ce n’est pas anormal. La solidarité n’est pas faite pour être rentable et la facturation des services du CCAS a fortement baissé pendant le confinement.

Pour les investissements, nous allons caler notre stratégie pour le mandat en fin d’année. Nous partons de deux certitudes : La deuxième tranche de l’école commence sereinement et il faut que nous retrouvions un niveau suffisant d’entretien de notre voirie communale. Il est hors de question d’accumuler du retard sur ce sujet majeur pour une commune comme la nôtre. Le reste fera l’objet d’un travail collectif pour avoir une idée précise des investissements sur toute la durée du mandat.

Peux-tu parler de la dette ?

Si j’étais taquin, je dirais que la dette fin 2020 sera supérieure à celle constatée à la fin de tes mandats de maire. Mais cette dette est le fait d’investissements cruciaux, des écoles, pour notre commune. Parmi les objectifs du mandat, je souhaite que nous évaluions la valeur des biens de la commune. Quelque chose me dit que notre patrimoine vaut plus que notre dette.

Donc il s’agit de maîtriser notre dette, d’emprunter à des taux faibles – c’est le cas – et surtout de rester capable de la rembourser rapidement (4ans et demi pour nous avec une côte d’alerte à 8 ans).

De ce côté, tout est donc sous contrôle, notre budget est « rustique ».

Les grands projets pour 2020 ?

La restructuration de l’école primaire Beausoleil. Nous avons pendant ce conseil validé les choix de la commission d’appel d’offres pour 2,419 K€ (HT) de travaux. Aucune mauvaise surprise puisque nous sommes dans l’enveloppe budgétaire prévue. On peut dire qu’il en est de même pour la restauration scolaire.

Vous êtes attentifs à la vie économique, et vous avez voulu apporter votre soutien à l’activité commerciale. Comment ? Certains disent que ce n’est pas assez…

Rappelons d’abord que la compétence économique est exercée par la Communauté de Communes. J’ai rappelé en conseil communautaire qu’il fallait rapidement formaliser un plan d’actions en matière de soutien à l’économie locale. Pour seule réponse, le vice-président « développement économique » sur le départ, Philippe Moulinas, a déclaré que « le fonds de solidarité Région Bretagne/ Intercommunalités était une dépense supplémentaire… »

Au niveau municipal, nous avons mobilisé les seuls leviers entre nos mains : droits de place du marché pas facturés sur un trimestre, pas de facturation des terrasses pour les commerçants, et pas de loyer quand nous sommes propriétaire des murs d’un commerce. Le reste sera de l’animation et dépendra des discussions que mène ma collègue Jeannine Magrex avec les commerçants !

Une prime de 1000 euros pour les personnels confrontés au risque du Coronavirus, ça mérite quelques explications

Au départ, c’est une suggestion de l’Etat, mais évidemment à notre charge !

Sur le fond, il me paraît normal que les « premiers de tranchée » de la crise sanitaire soient récompensés de leur sens du service public. Nous avons donc dressé la liste des agents concernés, de la police municipale aux personnels du foyer logement (résidence autonomie), du service d’aide à domicile. Aller au travail la peur au ventre, peur pour soi-même, peur aussi de transmettre le virus d’une maison à l’autre, ce n’est pas un quotidien normal pour des agents du service public. Ils savent notre reconnaissance et nous le leur rappellerons encore le 14 juillet prochain.

Et à la maison de retraite ?

Là, je ne peux pas répondre ! Le foyer-logement (Résidence autonomie) est sous l’égide du CCAS, de la commune. D’ailleurs, la commune apporte au CCAS une subvention qui permet de payer l’annuité des travaux de modernisation commencés en 2012 et achevés en 2014. La maison de retraite du Bois Joli est un établissement hospitalier sans lien financier avec la commune ! Bien sûr le maire est de droit le président du Conseil d’administration, mais c’est la directrice qui détient l’autorité ! Juste pour rappeler, les EHPAD ont trois sources de financement : la contribution des résidents (pour leur logement, la nourriture), la Sécurité Sociale pour tout ce qui relève du soin, et le Conseil Départemental qui doit financer les prestations liées à la dépendance.

Et le budget « panneaux photovoltaïques » ?

Pas grand-chose à dire sinon que c’était un bon choix ! La vente de l’électricité produite couvre sans problème l’annuité du prêt (capital et intérêts). On est près de la fin de l’emprunt et après ce sera une recette nette pour la commune. Avec le réseau de chaleur qui chauffe les écoles, la maison de l’enfance, la commune a fait les choix qui nous préparent à devenir un Territoire à Énergie Positive (TEPOS), un territoire où l’on produit plus d’énergie qu’on en consomme.

Produire de l’énergie, la stocker ou la partager, réduire notre consommation, nous sommes engagés à Questembert sur tous les axes de cette politique décisive pour notre avenir.

Une dernière question sur l’ambiance de travail. Si j’ai bien compris, M. Juhel, élu d’opposition, est le président de la commission Finances dont tu es le rapporteur. Ça mérite une explication ou au moins un commentaire.

Oui. Au Sénat, mon ami Vincent Eblé est président de la commission des Finances. Et C’est Nicolas Sarkozy qui a instauré cette pratique à l’Assemblée. Nous avons suivi le mouvement à la Région, avec un travail de qualité de Bernard Marboeuf, élu d’opposition. Je suis membre de cette commission et je constate combien ça évacue des suspicions quant au travail des services sur le budget. C’est un gage de transparence et donc de contrôle démocratique pour les Questembertois.

Nous n’avons rien à cacher en matière de gestion communale, assumons-le. Du coup, et comme on ne peut pas demander à Anthony Juhel de présenter le budget de la majorité, il me reviendra de présenter le fruit de notre travail collégial en commission. Je le remercie d’avoir accepté cette proposition.

Voir le budget communal avec calameo

La nausée et les mains sales

Nous sommes, paraît-il, entrés dans l’ère de la post-vérité, ou, pour reprendre les mots de la porte parole de D. Trump, Kellyanne Conway, l’ère des vérités alternatives (à la 3ème minute de la vidéo). On s’amuse – mais ça fait peur aussi – d’entendre le président américain parler de fake-news dès que les uns ou les autres parlent de faits concrets avérés. Malheureusement, ça se passe aussi près de chez nous. Les réseaux « sociaux » sont la principale source de contamination de ces sottises. Et j’emploie le mot contamination parce que c’est le mot juste.

« Instit en Alsace » décédée du Covid-19 ? Un fake

Comme souvent, c’est un texte copié-collé et partagé sur FB et ailleurs qui annonce la mort d’une institutrice en charge d’enfants de soignants suite à une infection au Covid-19 en Alsace. La fausse nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre ? Non, bien pire, comme une pandémie non maîtrisée ! A lire ici sur le site de France Inter, dont je reprends l’illustration.

Le fake diffusé sur FB

Ceci n’est qu’un exemple parmi d’autres. Et la multiplication des fausses nouvelles est un des traits les plus remarquables des époques de crise intense. Sans remonter à la Grande Peur de l’été 1789, ni même aux « canards » de la guerre de 14, qui ont fait éclore notre Canard enchaîné, il est facile de trouver des bobards diffusés pendant chaque période de tension. L’épisode des Gilets jaunes en a produit une belle collection. Pas étonnant donc que la pandémie de Covid-19 soit fertile en fausses nouvelles.

Les « canards » étaient des feuilles vendues à la criée dans les rues de Paris, décrivant des faits divers imaginaires. Ces « canards » constituent une version ancienne des « fake news ». Au 19e siècle, les Etats-Unis voient fleurir les exemples de « hoax », canular dont le but est de faire vendre du papier.

Ceux qui savent, ceux à qui on ne la fait pas

La parole officielle, parole des experts, parole des politiques, a été dévaluée par la défiance envers les élites. Car le peuple, lui, est censé détenir la vérité contre les mensonges relayés par les média mainstream, à la botte de l’oligarchie !

Il faut donc trouver des informations cachées, révéler les secrets ! Pensez à la valeur que gagne celui qui sait, celui qui détient la clé du secret. On a ainsi vu fleurir les sites de réinformation, d’information alternative. Tant qu’il fallait se procurer des livres papier publiés par des éditeurs confidentiels, le coût limitait la diffusion de ces informations dont l’origine était, par exemple, un « chercheur indépendant » d’une université australienne. Mais la généralisation d’internet et ensuite de ce qu’on a appelé les « réseaux sociaux » donne à ces fake news une très grande diffusion. On parle d’ailleurs d’un message « viral », ce qui est tout à fait approprié aujourd’hui.

Celui qui sait, qui a découvert la vérité cachée, et qui révèle le secret s’attribue ainsi une valeur aux yeux de ceux qui ne savent pas, ceux qui sont confinés dans l’ignorance ou leur aveuglement. Car lui ne s’est pas laissé berner par ce que disent les média mainstream, les journaux, les radios, les télés, simples instruments de la propagande officielle. A lui, on ne la fait pas !

Pourquoi ça marche ? le biais de confirmation

Outre cette valeur ajoutée du secret dévoilé, ceux qui relaient, ceux qui « partagent » sur leur « statut » vont choisir les infos qui viennent plutôt confirmer leur idée sur le sujet. Selon le principe bien connu  énoncé par Pierre Dac et repris par Coluche : Quand on voit ce qu’on voit, qu’on entend ce qu’on entent, que l’on sait ce qu’on sait, on a bien raison de penser ce qu’on pense. En termes plus savants, les sociologues parlent de biais de confirmation. Mais c’est bien la même chose !

Ainsi, le supporter des Républicains relaiera sans sourciller tous les points de vue proches de ce parti, le macroniste pur sucre ne supportera pas la moindre critique de son héros, l’insoumis trouvera toutes les grâces à JL Mélenchon et à Raquel Garrido, le gilet jaune considérera toute éructation de Fly Rider comme la synthèse définitive de la pensée de Robespierre. Mais tout le monde sait bien que les réseaux sociaux sont d’abord des réseaux d’affinités, où règnent l’entre-soi, et trop souvent, la détestation des autres !

(Des outils pour réfléchir)

Comment se défendre alors ? En adoptant des « gestes barrières », c’est-à-dire en se posant les bonnes questions.

OK Boomer ? Qui parle ?

Ok Boomer, c’est la réponse dédaigneuse des plus jeunes pour disqualifier la parole des papy-boomers – dont je suis – incapables de s’adapter à la modernité, enfermés dans leurs préjugés. Je pourrais leur répondre avec les mots de Brassens : « le temps ne fait rien à l’affaire ». Mais plus sérieusement, l’interpellation pose une question pertinente : qui es-tu pour parler ?

Sammy Newman

Quand nous parlons, nous exprimons bien sûr notre pensée – enfin pas les menteurs ! – mais cette pensée, que nous croyons personnelle, est le produit de ce que nous sommes : âge, sexe, position sociale, éducation, histoire de vie, place institutionnelle, etc.

La technique de la citation – vraie ou fausse – permet de donner de l’autorité à l’opinion mise en avant. Ainsi : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire. » Qui mieux que Voltaire pour parler de la liberté d’opinion, même quand la citation attribuée n’apparaît dans aucune œuvre du philosophe, comme on voit dans l’analyse donnée dans dicocitations – Le Monde.

Hanna Arendt, Aldous Huxley, et bien sûr George Orwell sont parmi les plus sollicités. Sans oublier Coluche. Prenons le temps de vérifier la validité de la citation.

Évaluer la source

Il faut aussi évaluer le médium, l’organe de presse, le site internet. Comptez-vous sur France Dimanche, Closer, ou Gala pour vous informer de la conduite des affaires publiques ? Pensez-vous qu’on puisse se fier à TPMP pour les comprendre ?

La développement des pure-players, des sites d’information qui n’existent que sur la toile, a vu fleurir le pire et le meilleur. On sait que Médiapart est très partisan, mais les informations qu’il met en ligne sont vérifiées. Ce n’est pas le cas de bien d’autres sites. D’ailleurs, les grands journaux ont mis en place des outils de vérification :

Le web nous donne accès aux sites d’info du monde entier et il est plus difficile de les évaluer. Cependant, je suis surpris que certains se plaignent de la presse française – assimilée à des organes de propagande – et fassent référence aux Russes de RT (Russia Today) ou de l’agence de presse Sputniknews.

Je suis surpris aussi de voir des gens qui se réclament globalement de la gauche, parfois même de la gauche extrême, qui affirment rejeter tout ce qui, de près ou de loin, se rapprocherait du parti de Mme Le Pen, relayer, sans s’en rendre compte ?, des sites de ce qu’on appelle la fachosphère, (on en parle même dans Valeurs Actuelles!). Et parfois, ils se laissent abuser par des titres en référence à la révolution (permanente), au grand soir, à la Résistance (Républicaine), à Voltaire.

On remarque aussi que les mêmes qui font remarquer à juste titre le poids des grands financiers dans la presse française ne s’inquiètent pas du financement de certains média… soutenus par la Russie de Poutine.

De généreux donateurs… polonais

Un exemple, un site qui fait référence à la France Libre avec comme logo une Tour Eiffel tricolore! Sous le titre Qui sommes-nous ? le site explique :

Quant au financement de notre site, nous avons trouvé sur notre chemin des amis de la liberté et de la civilisation occidentale qui soutiennent notre initiative, car ils partagent avec nous les mêmes valeurs et le même attachement à la liberté. Séduits par notre projet, ils ont décidé de nous aider pour le lancement de notre site, en apportant la seule et unique chose qui nous faisait défaut: les capitaux.
Nos investisseurs étant pour la plupart polonais, notre société est de droit polonais, dûment enregistrée au Registre de Commerce et des Sociétés à Varsovie.

Sans parler d’autres sites, qui se donnent comme grands défenseurs de la nation et sont hébergés à l’étranger pour échapper au droit de la presse tel qu’il s’applique en France. C’est à lire ici dans cet article du Monde : La « fachosphère » s’expatrie pour échapper à la justice.

La Nausée et les Mains sales, disait Pierre Desproges

Le regretté Pierre Desproges nous avait mis en garde contre les publications sujettes à caution : « Vous lisez Minute ? Non ? Vous avez tort, c’est intéressant. Au lieu de vous emmerder à lire tout Sartre, vous achetez un exemplaire de Minute, pour moins de dix balles, vous avez à la fois La Nausée et les mains sales. »



Les maires au temps du coronavirus

Chaque jour ou presque, la presse locale nous montre l’action des maires face à la crise du coronavirus : ils/elles assument leur rôle de tout leur cœur. D’abord, parce qu’ils doivent assurer la continuité du service public, mais aussi parce qu’ils sont au plus près des attentes et des besoins de nos concitoyens, surtout des personnes isolées et fragiles.

En première ligne

En ces temps de défiance généralisée envers les « politiques » les maires sont les élus à qui les citoyens accordent encore une forte crédibilité. Comme on l’a vu de façon très nette aux élections du 15 mars : beaucoup de communes avec une seule liste – ce qu’on peut regretter – et lorsqu’il y avait plusieurs listes, les sortants ont souvent été réélus haut la main. Il y a bien sûr des exceptions.

Assurer la continuité des services publics, c’est d’abord répondre aux obligations de base pour l’Etat-civil, mais aussi maintenir la propreté de la ville, faire respecter les règles de confinement définies par le gouvernement et précisées par les arrêtés préfectoraux. Dans une période difficile comme celle-ci, les services sociaux sont en veille maximum : il faut éviter que le confinement nécessaire ne soit pas aggravé par l’isolement des personnes les plus fragiles: CCAS, services d’aide à domicile, mobilisation du voisinage (des voisins bienveillants, plutôt que des voisins vigilants!)

Les élus sont aussi attentifs aux effets économiques de la crise : soutien aux entreprises locales et spécialement aux petits commerces. Beaucoup ont sollicité avec insistance le préfet pour obtenir la réouverture des marchés de proximité. Ils se préparent aujourd’hui à la réouverture des écoles, après le 11 mai, début promis du déconfinement. Et ce ne sera pas simple.

Certains en font trop ?

Il est important que l’action des élus soit rendue visible aux habitants, à travers la presse, les réseaux sociaux, enfin les moyens de communication habituels. A Morlaix, par exemple, la maire s’adresse aux habitants presque une fois par semaine en vidéo, et la page FB de la ville de Morlaix est mise à jour très régulièrement. Il faut aussi que les élus soient présents sur le terrain. Comme le dit Gaëlle Berthevas, maire de St-Abraham, dans la lettre de l’ARIC : ce qui est essentiel c’est de « maintenir le contact, garder le lien, « être là » et savoir qu’ils peuvent compter sur nous et appeler à tout moment. »

Sans doute peut-on avoir l’impression que certains en font trop. Comme Lariflette, autrefois, dans Ouest-France, ils sont tous les jours dans le journal. Mais n’est-ce pas mieux que d’être presque aux abonnés absents ?

Les employés qui assurent

Les élus passent le message et c’est bien, mais derrière leur communication, il y a le travail dans l’ombre des employés communaux ou intercommunaux. Eh oui, des fonctionnaires ! Totalement engagés dans le service public. Et, somme toute, c’est justice qu’ils soient mis au premier plan de la communication. Comme dans cette interview du responsable du CCAS de Questembert aux Infos du Pays Gallo.

Fédérer les bonnes volontés: des exemples pour s’inspirer

Faire face à la crise, c’est mobiliser les ressources qui sont à disposition, ressources matérielles et ressources humaines. Mais les élus en responsabilité doivent aussi fédérer les bonnes volontés. Comme par exemple, en Ille-et-Vilaine, l’initiative emmenée par Marie-Pierre Vedrenne, députée européenne, pour relayer les solidarités citoyennes.

Ou bien encore, à Nantes, la maire Johanna Rolland, pourtant touchée elle-même, a fait le pari du rassemblement en proposant aux responsables des listes concurrentes de coopérer dans la réponse aux multiples problèmes que pose la pandémie.

En un combat douteux

Le titre de mon blog annonce « un regard citoyen » ; et voilà près d’un mois que je n’ai rien publié. Et pourtant, je rumine plusieurs sujets : le rôle des élus face à l’épidémie, les fake news fausses informations relayées massivement, et d’abord la quasi impossibilité d’une réflexion sereine. Car nous avons désormais pas loin de 60 millions de spécialistes d’infectiologie, de stratégie sanitaire, et de prospective sur le passé.

Cygnes noirs, merles blancs

Ils n’ont rien prévu ! Et pourtant tout le monde savait. La catastrophe était prévisible. En tout cas, c’est ce qu’on entend tous les jours ces temps-ci. Mais connaissez-vous l’histoire des cygnes noirs ? Tant qu’on n’a pas découvert, fin XVIIème siècle, des cygnes noirs en Australie, il est admis que tous les cygnes sont blancs. L’expression très ancienne, comme le merle blanc chez nous, est reprise dans un livre de Nassim Nicholas Taleb publié en 2007 consacré aux crises financières. Le cygne noir désigne un événement à trois caractéristiques :

  • Il est absolument imprévisible, complètement improbable, hors de toute attente normale ;
  • il a des conséquences massives : rien ne sera plus comme avant !
  • Dès qu’il est advenu, il devient rétrospectivement prévisible : après coup, il est évident que tous les indices étaient là, sauf que personne ne les avaient vus !

D’ailleurs, Isabelle This Saint-Jean, professeur d’économie à Paris XIII et secrétaire nationale du PS, en fait la brillante démonstration dans un article de Libération, le 21 mars, Le Cygne noir et les aveugles.

En effet, tous les signes avant-coureurs étaient bien là ! D’abord, une épidémie massive était inéluctable. Nous l’avions échappé belle avec la grippe H1N1 en 2009. Mais qui ne s’est pas gaussé de Mme Bachelot et de ses millions de dose de Tamiflu, sans parler des 2 milliards de masques ? A commencer par Elise Lucet dans cette émission de 2010 (à voir ici).
Ce stock encombrant a fondu, il n’a pas été renouvelé, et ces milliards de masques nous manquent aujourd’hui.

Il est vrai qu’on a aussi peu à peu privé l’hôpital public de moyens. La mise en place de la tarification à l’activité (T2A) en 2007, par la loi HPST de la même Madame Bachelot a lancé la machine infernale dont nous mesurons les dégâts aujourd’hui : suppression de lits d’hôpitaux, réduction des effectifs de soignants, etc.

Et l’on pourrait faire la liste de toutes les décisions qui ont conduit à nous mettre en grande difficulté face à la pandémie. Mais, il faut quand même se rappeler que nous avons par des votes successifs et des majorités démocratiquement désignées mis au pouvoir et soutenu les dirigeants qui ont pris ces décisions !

Nous avons collectivement admis qu’il fallait payer moins d’impôts et nous nous plaignons maintenant de la dégradation des services publics ! Ah, oui vous allez m’expliquer que vous ne souhaitez payer moins d’impôts, mais que vous réclamez plus de justice fiscale. En fait, la justice fiscale, c’est quand moi je paie moins d’impôts et quand les autres apportent leurs justes contributions !

Ils savaient? Je dirais même que c’est voulu !

L’aveuglement collectif peut entraîner plus loin, vers des fantasmes complotistes. Non seulement, on refuse de voir l’enchaînement de décisions auxquelles nous avons consenti mais on cherche des responsables, et bien sûr on les trouve. Dans les situations de crise, on trouve toujours des boucs émissaires. Le gouvernement bien sûr, mais plus globalement, les « princes qui nous gouvernement », les élites du « système » qui sont forcément contre le peuple. D’où l’engouement pour le Professeur Raoult, vu comme le modèle de l’antisystème, alors qu’il est un grand professeur mandarin bien classique. Car non seulement ces responsables irresponsables n’ont pas agi à temps mais ils ont caché au peuple ce qu’ils savaient ; et bien sûr, ils savaient tout ! En tout cas, c’est des « informations » qu’on trouve sur internet en particulier avec le hashtag #ilssavaient. Et on n’est pas loin de sortir la guillotine : « Ils savaient et n’ont rien fait. Des têtes doivent tomber ! » Déferlement de haine, évidemment à partir d’informations tronquées ou carrément fausses. Lire par exemple cet article de La Croix Coronavirus : #IlsSavaient, la colère contre les élites s’exprime sur Twitter.

Plus fort encore, non seulement, ils n’ont rien fait, mais au fond, cela fait partie d’un plan secret. Un plan chinois contre Taiwan, un plan de la CIA contre la Chine, un plan de Bill Gates contre l’Afrique… J’entendais parfois dans mon enfance : « Mais tout ça c’est voulu! » Rien n’aurait donc changé ?

L’incurie, l’impéritie, la gabegie…

Je fais exprès d’employer des grands mots, parce que ça fait encore plus peur. J’ai mal à la tête, bon ça fait mal, j’ai des céphalées, alors ça devient grave, je souffre de céphalalgie, vite appelons le SAMU. Alors je traduis:

  • l’incurie : ils s’en foutent
  • l’impéritie : c’est des nuls
  • la gabegie : le désordre et le gaspillage

Voilà en résumé ce qui se dit de nos dirigeants ; rien de neuf, là non plus. Sauf que dans le contexte, aucun pays ne semble avoir trouvé des réponses complètement satisfaisantes ! Car les comparaisons restent hasardeuses, aussi bien sur le nombre des malades, des personnes touchées mais asymptomatiques. Bien malin qui s’y retrouve dans les chiffres publiés ici et là, comme le montre cet article du Monde  « Infections, tests, courbes ou données brutes : bien lire les chiffres sur le coronavirus. »

Gouverner, c’est prévoir, me rappelait un de mes correspondants sur les réseaux sociaux. Mais qui peut prévoir l’imprévisible ? Et dès lors, comment faire autrement que piloter presque à vue (dans le brouillard) en s’appuyant sur des conseils divers et, sans doute, compétents ?

Ceux qui ne devraient pas trop la ramener

Evidemment, certains tentent de surfer sur les difficultés. Mais, comme le rappelait X. Bertrand, « il y en a qui ne devraient pas trop la ramener ! » Sans remonter sur les choix politiques qui ont réduit les moyens dédiés au service public de santé, où les responsabilités, comme on l’a vu, sont largement partagées, revenons sur le premier tour des élections municipales. Dans les jours qui précèdent, la question se pose : faut-il les maintenir ? Je citerai seulement une réponse du leader officiel d’un grand parti politique : « Reporter les élections municipales serait un coup de force institutionnel » et une « utilisation de la crise sanitaire pour éviter une débâcle électorale ». Et il suffit de chercher un peu pour trouver que tous les caciques des partis tenaient à peu près ce même discours. Quelques jours plus tard, le ton avait changé : « une folie d’avoir maintenu ce premier tour ; on a mis en danger les électeurs et tous ceux qui tenaient les bureaux de vote. » Sans parler de tous ceux qui minimisaient le risque sanitaire « une grippette » et qui maintenant disent que le gouvernement n’a pas su voir venir la menace.

Le cynisme, ennemi intime de la démocratie

Dans le tohu-bohu, la confusion que provoque la pandémie, je conçois que l’on fasse des erreurs d’appréciation, par exemple qu’on pense à l’instant T qu’il vaut mieux garder le calendrier des élections tel qu’il était prévu, et qu’on se rende compte peu après qu’il aurait mieux valu les reporter. Mais pourquoi ne pas avouer l’erreur ? Pourquoi affirmer le juste contraire de ce qu’on disait quelques jours avant ? Cela s’appelle du cynisme de basse politique, le pire ennemi de la démocratie dans la crise que nous traversons.

Le monde d’après?

Que sera le monde d’après la pandémie ? Là encore, les prévisions sont difficiles. Une des rares certitudes : une dépression économique profonde, dont nous mettrons du temps à sortir. Choisirons-nous collectivement de redonner des moyens à nos services publics de santé, aux établissements d’accueil de personnes âgées ? Accepterons-nous de reconnaître la valeur de ce qu’apportent à notre pays les petites mains des métiers indispensables, ces « gens de peu » qui, quoi qu’en disent certains, ne sont pas des « gens de rien » ?

Tiens, voilà des questions qui pourraient l’objet d’un grand débat.